L'ex humoriste qui ne fait plus rire que ses derniers émules donnait le 26 décembre dernier au Zénith l'ultime représentation parisienne de son spectacle «J'ai fait le con».
Le clou de ce spectacle militant fut la venue sur scène du pape du négationnisme français, Robert Faurisson.
Accueilli avec force embrassades de Dieudonné devant les cinq mille spectateurs présents, celui qui avait déclaré lors d'un procès qu'il avait intenté à Robert Badinter en 2007 (et qu'il a perdu) que «les prétendues chambres à gaz hitlériennes et le prétendu génocide des juifs forment un seul et même mensonge historique» s'est vu remettre «le prix de l'infréquentabilité et de l'insolence».
Comble de l'ignominie, ce prix lui a été remis par le régisseur de Dieudonné, un certain Jacky, déguisé en déporté d'un camp de concentration portant l'étoile jaune.
Selon le journal Le Parisien, Jean-Marie Le Pen, parrain de la troisième fille de Dieudonné, était d'ailleurs présent dans la salle ce soir-là, pour cette dernière représentation. L'information, rapportée par un témoin sur place, a été confirmée au quotidien par le conseiller régional du Rhône-Alpes Jacques Vassieux: «Il était dans la salle avec son épouse, Jany, ainsi que de nombreux adhérents du FN», précise l'élu frontiste. Contactés par le journal, ni Dieudonné ni Le Pen n'ont souhaité confirmer.
«Je ne suis pas d'accord avec toutes ses thèses», a déclaré Dieudonné dans le Journal du Dimanche. «Il nie par exemple la traite des esclaves organisées depuis l'île de Gorée, au large de Dakar. Mais pour moi, c'est la liberté d'expression qui compte.» Mais que pense Dieudonné des thèses de Faurisson sur la Shoah? Mystère...
Pour les plus jeunes lecteurs de ce bloc-notes, il convient de rappeler qui est Robert Faurisson, honoré par Diedonné le 26 décembre dernier. Il est le plus connu des représentants du courant révisionniste, qui nie le massacre des juifs pendant la deuxième guerre mondiale.
Robert Faurisson va se faire connaître du grand public par la publication d'une tribune envoyée par lui au quotidien Le Monde le 16 janvier 1979 où il dénonce la Shoah et où il nie le massacre de 6 millions de juifs pendant la seconde guerre mondiale ainsi que l'existence des camps d'extermination.
Robert Faurisson est condamné pour la première fois pour ses propos le 3 juillet 1981 lors d'un procès contre le grand historien Léon Poliakov qu'il avait traité de « manipulateur et fabricateur de textes ».
Robert Faurisson est condamné, le 18 avril 1991, à cent mille francs d'amende avec sursis pour « contestation de crime contre l'humanité », par la 17ème chambre correctionnelle de Paris. Dans un entretien au magazine Choc du mois de septembre 1990, il déclarait, notamment, que « le mythe des chambres à gaz est une gredinerie » et qu'il a « d'excellentes raisons de ne pas croire à cette politique d'extermination des Juifs, ou à la magique chambre à gaz, et on ne me promènera pas en camion à gaz. » Patrice Boizeau, directeur de la publication du mensuel, a, lui aussi, été condamné, à trente mille francs d'amende et à verser vingt mille francs de dommages-intérêts à chacune des onze associations d'anciens déportés qui s'étaient constituées partie civile. Le tribunal a également ordonné la publication du jugement dans quatre quotidiens, à raison de quinze mille francs par journal.
Il est condamné, le 27 avril 1998, à vingt mille francs d'amende pour « contestation de crime contre l'humanité », par la 17ème chambre correctionnelle de Paris, pour avoir nié l'existence de la Shoah dans un courrier publié dans l'hebdomadaire d'extrême droite Rivarol le 12 juillet 1996.
La dernière condamnation en date fait suite à la plainte déposée par le MRAP, la LICRA et la LDH à la suite des propos tenus en février 2005 sur la chaîne iranienne Sahar 1. Il contestait l'existence d'une tentative d'extermination des Juifs par le régime nazi, affirmait que les nazis cherchaient une « solution territoriale » consistant à installer les Juifs dans un autre pays (comme la Palestine) pour qu'ils ne soient plus des « parasites » et attribuait à des épidémies les décès des personnes dont les cadavres apparaissent sur des photographies.
Il a reconnu que les propos qui lui étaient reprochés exprimaient le fond de sa pensée,
mais a déclaré qu'il ne se souvenait pas s'il avait effectivement tenu ces propos et qu'il ignorait que les propos reprochés étaient destinés à être diffusés sur une chaîne de télévision par
satellite qu'on peut capter en France.
Le 11 décembre 2006, Robert Faurisson participe à une conférence sur l'Holocauste organisée par le président iranien Mahmoud Ahmadinedjab à Téhéran et qui rassemble les principaux négationnistes du monde entier. Le président de la République, Jacques Chirac, demande alors l'ouverture d'une enquête préliminaire au sujet du discours qu'il prononce à l'occasion de la conférence.
Le parquet de Paris a confirmé, le 4 juillet 2007, qu'il avait effectivement ouvert une procédure contre les propos tenus à Téhéran par Robert Faurisson, afin de déterminer quels propos exacts
ont été reproduits, et sur quels médias ils avaient été diffusés en France.
Lundi dernier, le parquet de Paris a annoncé avoir ouvert une enquête préliminaire après la prestation au Zénith de Robert Faurisson. Il s'agit de "vérifier dans quelles conditions Dieudonné Mbala Mbala a remis, sur la scène du Zénith dans la nuit du 26 au 27 décembre, le prix de l'infréquentabilité et de l'insolence à Robert Faurisson". L'enquête a été confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne. Elle aura "pour objet de déterminer si les délits de contestation de crime contre l'humanité commis au cours de la Seconde Guerre mondiale ou d'injures antisémites ont été perpétrés à cette occasion", a indiqué le parquet de Paris.
En ce qui concerne la venue de Faurisson au Zénith, Dieudonné semble bien avoir préparé son
coup. L'objectif étant de rester suffisamment border-line pour ne pas s'attirer les foudres de la loi, tout en veillant à ce que son message passe bien. "Je ne pense pas qu'il y ait
eu des propos négationnistes au Zénith" a expliqué Serge Klarsfeld sur RTL, en ajoutant cependant que "les poursuites ne lui paraiss[aient] pas possibles". "Je vis
douloureusement" cette provocation", a affirmé lundi le fondateur de l'association des fils et filles des déportés juifs de France et nous le comprenons
tous.
SOS Racisme, quand à elle, s'est dite "satisfaite" de l'ouverture d'une enquête préliminaire, a précisé pour sa part mardi dans un communiqué qu'elle a chargé Maître Patrick Klugman de "donner toutes les suites judiciaires nécessaires à cette nouvelle salve aux relents antisémites de Dieudonné". L'association "rappelle que la mise à l'honneur de Faurisson par Dieudonné, ainsi que la remise d'un "prix" à ce négationniste notoire par une personne représentant un déporté juif, ne relèvent pas de la simple provocation ou d'un mauvais goût sur lequel il faudrait passer".
«Dieudonné vient rappeler qu'il est bien un nouveau leader de l'extrême-droite en
choisissant d'honorer Robert Faurisson», a estimé de son côté l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), selon qui «assister à un spectacle de Dieudonné, c'est participer à un
meeting d'extrême-droite».
Il faut saluer la réaction du Conseil représentatif des associations noires (Cran) qui dénonce cette "effroyable mise en scène", et qui a demandé mardi, dans un communiqué, "la mobilisation de tous nos concitoyens ainsi que la fermeté des pouvoirs publics contre le racisme, l'antisémitisme ainsi que toutes les intolérances qui se renforcent et aboutissent aux discriminations". Le Cran, qui se "félicite" de l'ouverture d'une enquête préliminaire par la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP), "souhaite l'application la plus sévère de la loi si l'apologie de contestation de crime contre l'humanité commis au cours de la Seconde guerre mondiale était constituée".
Que Dieudonné soit une nouvelle fois condamné ou pas, je pense aujourd'hui au 6 millions de
juifs, exterminés parce qu'ils étaient juifs. Je pense aux déportés, comme Simone Veil, qui ont eu la chance de revenir des camps de la mort. Je pense aux familles, enfants et petits
enfants des déportés. Ils ont été une nouvelle fois humiliés et meurtris. Dieudonné veut leur faire mal. Encore et toujours. Parce qu'ils sont juifs. C'est pour eux que j'écris ces quelques
lignes. Par pour l'énième pantalonade de ce bien triste sire...
Voir la vidéo de Robert Faurisson aux côté de
Dieudonné :
Dieudonné & Robert Faurisson
Pour aller plus loin :
° Dieudonné s'enfonce encore et toujours plus, sur ce site
° Vade retro soutanas, portrait de l'abbé Laguérie par Catherine Coroller.
° Traditionalistes : des laïcs bordelais s'inquiètent, Mgr Ricard leur répond.
° Robert Faurisson sur wikipedia
° Philippe Laguérie sur wikipédia
° Dieudonné sur wikipédia
° Nouveau dérapage de Dieudonné sur LePost.fr
° Dieudonné condamné à 7 000 euros d'amende pour des propos antisémites.
° Dieudonné, condamné pour incitation à la haine raciale pour des propos antisémites.
° Dieudonné fait se bidonner ses nouveaux amis du Front National venus le voir en spectacle.
° Dieudonné à la fête du Front national.
° Jean-Marie Le Pen trouve l'antisémitisme de Dieudonné "assez drôle".
° Dieudonné salue la victoire du Hamas
° Communiqué du Cercle Léon Blum sur Dieudonné
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