Vu sur le site de la Tribune de Genève :
"Je ne cesserai jamais de dire que l'islam nous donne la liberté, y compris celle d'insulter Dieu." C'est Mohamed Talbi qui l'affirme sans détour dans les colonnes du Monde. Profondément croyant, l'historien tunisien est un inconditionnel du Coran. A ne pas confondre avec la charia, loi islamique développée deux siècles après le Prophète, rappelle-t-il. «Jamais le Livre saint n'a recommandé de couper la main des voleurs ou de lapider les femmes adultères!»
Bref, pour cet islamologue décapant, le pape a bien le droit de s'exprimer. Comme tout le monde, d'ailleurs. Il n'y a pas non plus de raison que des caricaturistes se retiennent de brocarder le Prophète. Le romancier Michel Houellebecq, «un garçon sympathique», peut écrire sans autre que l'islam est la religion «la plus con du monde». Et même, au fond, un prof de philo doit pouvoir prétendre dans le Figaro que Mahomet n'était qu'un «chef de guerre impitoyable, pillard, massacreur de juifs et polygame».
On aimerait bien sûr que tous les musulmans défendent avec autant de ferveur la liberté d'expression. Ce n'est évidemment pas le cas. Et on peut le comprendre. Pas facile, en effet, d'essuyer sans broncher les critiques et les injures, souvent plus provocantes les unes que les autres.
Bien des gens y voient des attaques contre leur identité personnelle, souligne Hasni Abidi, du Centre d'études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen (Cermam). «L'islam est une identité de repli pour qui ne se sent pas accepté, accueilli, intégré. Les musulmans en Occident sont pris pour cibles et ne comprennent pas pourquoi. Ils sont encore dans une phase de transition. Transition entre le respect dû au sacré sur leurs terres d'origine et la primauté de la liberté d'expression dans leurs pays d'adoption.» Leur colère ne doit pas surprendre. Ça n'en fait pas des tueurs.
Faudrait-il donc, pour ne pas brusquer cette multitude de «modérés», éviter la critique? Ce tabou poli serait, à mon sens, extrêmement dommageable pour nos sociétés. Car l'autocensure exclut du débat les critiques les plus constructives. Aujourd'hui déjà, on entend surtout les plus virulents détracteurs de l'islam. A l'exception du pape, dont les paroles «mal comprises» ont débouché sur un dialogue avec le monde musulman.
Alors oui, il faut critiquer l'islam. Autant que le christianisme, le judaïsme, le bouddhisme ou toute autre religion. Critiquer de bonne foi. Entrer en discussion. Ne pas laisser tomber les musulmans
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