Le 19ème est sous tension depuis des mois. Injures, bagarres se multiplient. Pour des raisons de contrôle de territoire, par désoeuvrement... certainement.Il n'en reste pas moins que le 19eème arrondissement arrive en tête des quartiers de Paris touchés par les actes antisémites : 25 contre 8 dans l'arrondissement voisin du 20ème l'année dernière.
De nombreux incidents antisémites, crachats, insultes, voire menaces physiques, ont fait monter la tension dans cet arrondissement qui accueille la plus importante communauté juive d'Europe - 40 000 âmes sur 180 000 habitants.
Et, comme pour Rudy, est-ce vraiment l'effet du hasard si l'agression a eu lieu un samedi, jour de Shabbat, où beaucoup de jeunes juifs (notamment sépharades) portent une kippa ? Evidemment non.
Jean-Yves Camus, chercheur associé à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), bon connaisseur du monde juif, pense que pour beaucoup de jeunes agresseurs"c’est le port de la kippa et éventuellement des tsitsits qui fait un juif traditionnel. Or il n’y a pas de code normatif du juif traditionnel! Simplement, un jeune qui se fait agresser avec sa kippa, ça reste un juif visible."
Et c'est bien à ce juif visible qu'on veut s'attaquer.
J-Y Camus a raison de souligner quela communauté juive de France s’est «décomplexée», en notant qu’il y a une vingtaine d’années, «sortir avec une kippa sur la tête n’allait pas de soi, y compris chez beaucoup de juifs.»Cette "décomplexion" a eu lieunotamment sous l’influence de Joseph Sitruk, devenu Grand rabin de France en 1987 (qui sera remplacé le 1er janvier prochain par Gilles Bernheim), dont Camus dit qu’il a œuvré «en pasteur et pas seulement en porte-parole de la communauté, prônant un retour à la religion, dans mais aussi en dehors de la communauté».
Camus poursuit : «Vous avez à Paris quatre radios juives, un hebdomadaire, trois mensuels… des tas d’écoles juives, de synagogues, de restaurants casher. Le 19ème arrondissement de ce point de vue-là est le quartier de Paris où les juifs ont le plus de visibilité car vous trouvez à la fois une forte population juive, une forte population juive religieuse, des écoles et notamment cet énorme établissement de la rue Petit, des groupes orthodoxes et une importante communauté loubavitch ; des restaurants ; des lieux de culte extrêmement fréquentés avec une synagogue consistorielle mais des dizaines d’autres synagogues par communautés religieuses ou géographiques… »
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Bien évidemment pour Camus, comme pour tous les démocrates, cela ne justifie en rien les agressions.
Au contraire, nos concitoyens juifs de France ont bien raison d'être "décomplexés"! Leur demande t'on d'avoir honte d'être juifs et de se cacher? De ne pas mettre de kippa le samedi parce
que ça en indispose certains?
Est-il légitime qu'un "juif visible" devienne une cible parce qu'il est visible? Ce serait proprement intolérable et ça ne peut être tolérer dans notre démocratie.
"C'est de la haine gratuite contre les juifs", dit Michel Bouskila, qui est bien placé pour
connaître la situation puisqu'il est le responsable du conseil de la communauté juive du 19e arrondissement de Paris. "Les jeunes juifs qui portent la kippa sont pris à partie quand
ils sortent de la synagogue ou quand ils s'y rendent. On vit dans une insécurité constante", dit-il en dénonçant "le laxisme de la police". "Comme en 2002, après le déclenchement de la deuxième Intifada, des responsables musulmans tentent d'importer en France le conflit
israélo-arabe" poursuit-il. Sans faire forcément le lien de cause à effet, il n'en reste pas moins que l'agression
de samedi a commencé par des jets de pierres.
Bertrand Delanoë comme Roger Madec, le maire du 19ème arrondissement, ont raison de demander une augmentation significative des forces de Police dans ce secteur. Il faut que les
auteurs d'agressions antisémites soient définitivement éradiqués et placés une bonne fois pour toute hors d'état de nuire.
Raphaël Haddad, le président de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF), qui a
lui même habité longtemps le 19ème, a donc bien eu raison de déplorer une «agression à caractère antisémite», tout comme le maire de Paris, Bertrand Delanoë.
Un vieux proverbe yiddish disait : "heureux comme Dieu en France". Traduit, depuis la Révolution, l'Empire et le décret Crémieux de 1870 : "Heureux comme un juif en France".
Les français de confession juive doivent pouvoir continuer à être heureux en France. C'est tout ce qu'ils demandent. C'est tout ce que nous souhaitons.
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également :
° Agression antisémite samedi dans le 19ème arrondissement de Paris. : sur ce site.
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