Le président de la République, Emmanuel Macron annoncé samedi 23 novembre, à l’occasion du 80ème anniversaire de la Libération de Strasbourg, le 23 novembre 1944 que le grand historien français, Marc BLOCH allait bientôt entrer au Panthéon.
« Pour son œuvre, son enseignement et son courage, nous décidons que Marc Bloch entrera au Panthéon », le résistant et historien, « l’homme des Lumières dans l’armée des ombres » tel que l’a qualifié le chef de l’Etat, a été assassiné par la Gestapo en 1944 près de Lyon. Marc Bloch avait fait une partie de sa carrière à l’université de Strasbourg.
La famille de Marc Bloch a salué sa panthéonisation, quatre-vingts ans après sa mort, à laquelle appelaient depuis longtemps responsables politiques et historiens.
« C’est une très grande émotion et fierté. Il s’est donné corps et âme pour la liberté et contre le nazisme », a déclaré sa petite-fille Suzette Bloch à l’Agence France-Presse (AFP).
Marc BLOCH fut l’un des historiens majeurs du 20ème siècle.
Lucien Febvre (1878-1956) et Marc Bloch (1886-1944) fondent « L’École des Annales », un mouvement historique majeur, à la fin des années 1920.
C’est l’Histoire prise enfin dans le temps long.
L’Ecole des Annales met en avant une histoire globale, à la fois dans le temps (longue durée) et dans l'espace (prise en compte des faits de société dans leur ensemble).
Caractérisées dès leurs débuts par une volonté de transdisciplinarité au sein des sciences sociales et un rejet ferme de l'histoire politique classique, les Annales renouvellent en profondeur l'historiographie française du 20ème siècle, qu'elles dominent durant plus de quarante ans à travers plusieurs « générations » d'historiens.
À partir de la Libération, les héritiers de cette école sont, notamment, Fernand Braudel, Pierre Goubert et Ernest Labrousse puis Georges Duby ou encore Emmanuel Leroy Ladurie, Jacques Le Goff, Marc Ferro.
L’histoire des mentalités, menée par Philippe Ariès, Georges Duby, Michel Vovelle, Robert Mandrou et Jacques Le Goff, va connaître un succès considérable et offre à l'École des Annales son rayonnement national et international le plus spectaculaire.
Mais Marc BLOCH est aussi un grand Résistant.
Il est - en tant que Juif - exclu de la fonction publique par le gouvernement de Vichy en vertu du statut des Juifs du 3 octobre 1940. Son appartement parisien est réquisitionné par l'occupant, sa bibliothèque expédiée en Allemagne.
Le Doyen de la faculté des Lettres de Montpellier où il fini par être tout de même nommé, Augustin Fliche, catholique et maréchaliste, antisémite, réactionnaire et conservateur, va essayer d’empêcher sa nomination, nourrissant un ressentiment à l'égard de l'historien et va tout faire pour lui rendre la vie impossible.
Il faut lire et relire « L’étrange défaite », essai d'histoire immédiate et témoignage de BLOCH sur les insuffisances des élites qui sombrent en mai 1940 dans la guerre comme elles avaient pu sombrer dans l'esprit munichois en septembre 1938.
Il décrit la défaite et la débâcle françaises comme permises, voire voulues, par le « commandement » et le gouvernement, influencé par les élites militaires, économiques et sociales réactionnaires et conservatrices, la collosion entre les forces réactionnaires de la droite et de l’extrême-droite.
Selon lui, ces élites françaises (avec le soutien de la presse) ont volontairement évité d'armer assez efficacement le pays face à l'expansion nazie, ont préféré la nazisme au Front Populaire (« plutôt Hitler que Léon Blum »), ou refuser de faire jouer les alliances, notamment celle avec l'Union soviétique, qui auraient pu contrer l'hégémonie hitlérienne annoncée dans Mein Kampf.
Il entre dans la clandestinité fin 1942, quand les Allemands envahissent la zone libre.
En 1943, après l'invasion de la zone sud qui ne le laisse en sécurité nulle part, il s’engage dans la Résistance, dont il devient un des chefs pour la région lyonnaise au sein de Franc-Tireur, puis dans les Mouvements unis de la Résistance (MUR).
Il est arrêté place du Pont, à Lyon le 8 mars 1944 par la Gestapo, interné à la prison Montluc et torturé pendant des jours, soumis à des coups et à des bains glacés, mais il ne donne jamais aucune information. Le soir, il enseigne la France et son Histoire à des prisonniers français.
Il meurt pour la France dans la soirée du 16 juin 1944, fusillé dans le dos par quatre tueurs de la Gestapo, aux côtés de vingt-sept autres résistants rassemblés par groupes de quatre « qu'il animait de son courage », à Roussille sur la commune de Saint-Didier-de-Formans.
Un témoin raconte : « un gosse de seize ans tremblait près de lui : « Ça va faire mal. » Marc Bloch lui prit affectueusement le bras et dit seulement : « Mais non, petit, cela ne fait pas mal ».
Et il tombe en criant, le premier : « Vive la France ! ».
Voici l’homme, le professeur, l’historien, le Résistant que fut Marc BLOCH, mort pour la France à 57 ans.
En bref, un vrai Français.
Pour être fidèle à la mémoire de Marc BLOCH, à sa vie, à son œuvre et à ses convictions, les ayants droits de Marc BLOCH ont écrit au Président de la République afin de préciser les contours de la cérémonie :
Pas de religion, pas de présence communautaire et par d’extrême droite, sous toutes ses formes.
Au moins les choses sont claires.
Jean-Laurent Turbet
Médiapart s’est procuré cette lettre que je reproduis ci-dessous :
« Monsieur le Président de la République,
Monsieur Bruno Roger-Petit,
La famille de Marc Bloch se réjouit de votre intérêt pour sa vie et son œuvre. La Panthéonisation, comme acte de reconnaissance de la France de l’apport intellectuel et de l’héroïsme de Marc Bloch, est pour nous un grand honneur.
Fidèle à une tradition familiale de grande vigilance et exigence sur l’usage de la mémoire de notre aïeul, il nous apparaît nécessaire de vous exposer nos souhaits sur le processus de Panthéonisation.
La vie de Marc Bloch, exemplaire, a été l’objet de nombreuses récupérations politiques auxquelles nous nous sommes toujours opposés. La Panthéonisation est l’occasion de mettre fin à cette évidente incompréhension ou méconnaissance, et de faire diffuser au plus grand nombre sa pensée et son courage. Nos demandes sont les suivantes :
- Nous souhaitons que Marc Bloch entre au Panthéon avec sa femme, Simonne Bloch, née Vidal. Leurs corps devront toutefois rester au cimetière du Bourg d’Hem, en Creuse. La famille envisage un cénotaphe, avec des objets symboliques (décorations militaires, ouvrages, testament…).
- La vie de Marc Bloch s’est structurée autour d’une œuvre d’historien, aujourd’hui mondialement célèbre. Une place égale doit être faite à l’historien et au professeur, au résistant et au combattant. L’association avec l’Université et l’Education nationale doit être la colonne vertébrale du projet de Panthéonisation. L’intégration de la jeunesse nous semble essentielle.
- Nous rappelons également que l’œuvre de ce patriote convaincu est profondément anti-nationaliste, construite contre le roman national et la réduction de l’histoire française aux frontières nationales. Cet engagement se concrétisa jusque dans la mort. En ce sens, il nous paraît essentiel que l’extrême droite, dans toutes ses formes, soit exclue de toute participation à la cérémonie.
- La famille tient à ce que l’hommage soit purement civil, comme Marc Bloch le demandait dans son testament. En ce sens, aucune récupération ou présence religieuse et communautaire ne nous semble acceptable. Marc Bloch, athée, n’avait foi qu’en une seule idée, la République.
- Nous souhaitons que la famille soit pleinement associée au processus de Panthéonisation, ainsi que des historiens dont nous connaissons l’expertise sur Marc Bloch.
En nous réjouissant de cet honneur fait à Marc Bloch, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de nos sentiments respectueux. »
SUZETTE BLOCH et MATIS BLOCH,
les mandataires des ayant-droit
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