J'aime les histoires de loges et les biographies de frères. J'en parle souvent sur ce bloc-notes.
Car la Franc-Maçonnerie s'incarne. Elle s'incarne dans des hommes qui s'engagent et qui, bien souvent, y consacrent l'essentiel de leurs vies.
Nous nous souvenons de biographies qui ont marqué leur époque, celles de Richard Dupuy, de Michel de Just, de Michel Barat, de Jean Verdun, d'Henri Tort-Nouguès qui ont été Grands Maîtres de la Grande Loge de France.
Pour la première fois me semble-t-il - mais il faudra que je vérifie plus avant ! - nous avons entre les mains l'autobiographie d'un ancien Souverain Grand Commandeur du Suprême Conseil de France.
Claude Collin, qui écrit avant tout en franc-maçon écossais, c'est à dire en membre actif de l'Ordre Ecossais, nous livre ici sa vérité, à la fois objective et subjective (et c'est bien cela qui est passionnant) qui l'a mené de son initiation au sein de la loge Les Vieux Amis à l'Orient de Marseille à la direction du second Suprême Conseil du Monde, le Suprême Conseil de France.
Une vie au service de l'Ecossisme, avec ses doutes, ses joies, sa passion toujours intacte après toutes ces années. Et, je dois le dire, avec la modestie d'un vrai cherchant, toujours en quête d'un élément nouveau, d'une idée, d'un aspect du Rite, de l'Histoire de l'Ordre. Claude Collin est toujours en action.
Claude a été le témoin de l'évolution de notre ordre vers plus de questionnement autour de l'Initiation et de la spiritualité.
Il se souvient que dans sa loge symbolique à Marseille il était à l'époque fort peu question de symbolisme : "En effet, nous étions alors à Marseille proche du Grand Orient, au moins par l'esprit, ce qui ne favorisait que fort peu la réflexion initiatique" (p.39).
Les planches brillantes il en a entendu, mais est-ce l'essentiel ? " Parmi toutes les vertus caractéristiques de l'Ordre, ce qui semble le plus important demeure la fraternité d'un groupe de cherchants. Le reste, les discours académiques, les longues tirades n'ayant d'autre objet que de mettre en valeur l'orateur constituent des pertes de temps et éloignent de l'objet même de la Maçonnerie qui, ne l'oublions jamais, est la reconstruction en soi d'un nouvel initié ayant subi la déstructuration de ses certitudes profanes, aidé en cela par la vie en loge" (p.39). On ne saurait exprimer mieux et plus clairement le but de la démarche.
Claude Collin explique bien la situation entre les deux structures que sont la Grande Loge de France et le Suprême Conseil de France : Entités clairement indépendantes l'une par rapport à l'autre, mais interdépendantes par le Rite, notre Rite, le Rite Ecossais Ancien et Accepté.
Claude Collin nous explique sa progression dans le rite et son entrée en 1969 au sein de la loge de Perfection Le Parvis Phocéen. Il faut le lire - parfois avec un sourire amusé - tant il se plaint du peu de connaissance initiatique des frères, y compris dans sa loge de Perfection. En 1971 il reçoit le 14ème degré.
En 1973 il devient, à 32 ans, le Vénérable Maître de sa loge, Les Vieux Amis. Il donne sa définition d'un bon Vénérable Maître : "Il doit être le chef d'Orchestre qui tient la baguette afin de régler l'exécution d'une partition bien structurée, suscitant éventuellement les interventions des frères timides ou réservés, de manière à ce que le plus grand nombre puisse participer et s'exprimer, mais en aucun cas de se poser en brillant concertiste" (p.67).
En 1973 également il devint Chevalier Rose-Croix, 18ème degré du Rite.
"Devenir Chevalier Rose-Croix sauvait quelque peu ma démarche maçonnique car je pénétrais dans une forme de spiritualité, la construction de mon temple par l'esprit après la faillite du Temple de pierre.
Le décorum la beauté spectaculaire de la cérémonie d'initiation m'emplit d'une forme de plénitude que je n'avais, pas connue jusqu'alors. J'oserais presque avouer, qu'au-delà de mes souvenirs, je ressentis pour la première fois ce jour là une émotion intense trouvant sa source dans la rencontre sensible avec un univers maçonnique spirituel matérialisé, quand bien même cela se raccrochait pour moi à une vie religieuse antérieure. Il est vrai que je n'avais jamais encore abordé le sens de ce personnage, grand initié s'il en fut, au point d'être reconnu comme prophète même par l'Islam, car établi dans la descendance d'Abraham, père des religions monothéistes". (p.74).
Au début des années 1980 Claude Collin devient député de sa loge puis entre au Conseil Fédéral en 1987 jusqu'en 1990 (il sera Grand Orateur).
Sur le plan profane il dirige tous les services opérant sur la voie publique de la ville de Marseille. Il devient l'un des cinq directeurs généraux de la ville de Marseille avec la DG en charge de la gestion des pouvoirs de police du Maire domaine qui comportait l'unité militaire des bataillons de Marins Pompiers de Marseille. Une tâche très prenante à haute responsabilité.
Il est Chevalier Kadosh, 30ème degré du Rite en 1982, 32ème en 1989 puis Souverain Grand Inspecter Général, 33ème degré en 1991. l'année suivante il est coopté membre actif du Suprême Conseil de France.
Il décrit ensuite toutes ses missions de Lieutenant Grand Commandeur (il sait bien nous faire revivre ces moments par ses propos imagés) avant ce 18 juin 2009 où il est intronisé Très Puissant Souverain Grand Commandeur du Suprême Conseil de France.
Je vous laisserai bien sûr le soin de lire par vous même la relation que fait Claude Collin de son action à la tête du Suprême Conseil de France. Il décrit sans fard les bonheurs mais les grandes difficultés de la tâche, et qu'il faut parfois (souvent?) prendre des décisions difficiles. Mais toujours pour le bien de l'Ordre.
Claude Collin a son franc-parler et n'est parfois pas très tendre. Il exprime sa vérité. Cette vérité est évidemment toujours subjective et peut-être l'objet de contestations ultérieures par certains intéressés. Mais au moins les choses sont dites et assumées. Et c'est l'essentiel.
J'ai pensé en lisant ses lignes qu'il voulait livrer un témoignage vrai sur son expérience de franc-maçon du 1er au 33ème degré et jusqu'à la charge ultime de Grand Commandeur. Une charge à la fois exaltante mais qui exige un dévouement total à l'Ordre quitte à souvent s'oublier soi-même. La charge de la fonction l'emportent sur tout, même sur son caractère : il faut parfois prendre des décisions qui vont à l'encontre de son moi profond si elles son prises dans l'intérêt de l'Ordre. Vous en découvrirez beaucoup d'exemples dans ce livre.
Il faut reconnaître aussi que souvent Claude Collin n'est pas tendre avec lui-même. Par exemple il exprime souvent des regrets de n'avoir pas pu être aussi présent qu'il l'aurait voulu dans sa loge symbolique durant toutes ces années de mandats au sein du Suprême Conseil. Ce n'est pas un livre apologétique ni de justification. S'il parle de son action il ne manque pas de pointer aussi ce qu'il appelle ses faiblesses et les choses qu'il referait certainement autrement aujourd'hui d'après son expérience.
Et surtout il prend soin de mettre en lumière tous les frères qui ont travaillé avec lui (on ne peut rien faire tout seul, quel que soit le niveau atteint) comme son successeur Jacques Rozen dont il ne tarit pas d'éloges.
Chacun sait, enfin ceux qui connaissent un peu Claude Collin, que sous une épaisse armure, une carapace écossaise, bat un cœur sensible d'une fraternité sans limite...
Ce qu'il en ressort c'est son amour vrai, sincère, profond et durable pour le Rite Ecossais Ancien et Accepté, pour l'Ordre Ecossais, pour tous ses frères et toutes les loges de tous degrés qu'il a pu connaître.
Ce livre qui vient en complément du précédent intitulé "Origine et gouvernance du Rite Ecossais Ancien et Accepté par un ancien Grand Commandeur".
Mais laissons à Claude Collin les mots de conclusion :
« J'ai beaucoup apprécié la formule utilisée par mon successeur à mon endroit lors de ma descente de charge. Sans doute ai-je été trop directif et surtout suis-je un sabra piquant à l'extérieur et sucré à l'intérieur évoquant la figue de Barbarie. Peut-être était-ce façon pour lui de rendre hommage au fond à la personne que je suis réellement, un Maçon sincère et exigeant qui a placé sa vie au service de l'Ordre Ecossais. L'initié pourrait ajouter "un homme vrai en toutes circonstances", ou plus simplement "Je suis ce que je suis". » (P.195).
Et il a écrit un livre de témoignage important qui doit être lu par tout franc-maçon écossais.
Jean-Laurent Turbet
Le mot de l'éditeur :
Dans le sillage de son précédent ouvrage, Origine et gouvernance du Rite Écossais Ancien et Accepté par un Grand Commandeur, l’auteur, Grand Commandeur Honoraire du Suprême Conseil de France, poursuit ici sa mission, pour ne pas dire son devoir de transmission, par l’exemple d’un parcours maçonnique qu’il dévoile par des touches successives où pointent l’humilité, et parfois l’incompréhension devant une destinée qu’il a certes bâtie mais à laquelle rien ne semblait le prédestiner.
Entré à la Grande Loge de France à l’âge de vingt-deux ans, président d’Atelier, député, puis Conseiller Fédéral de l’Obédience, il intègre la Juridiction du Suprême Conseil de France à l’âge remarquable de vingt-huit ans. Tout en assumant de hautes responsabilités dans la vie civile, il n’aura de cesse de se mettre au service de l’Ordre Écossais en gravissant toutes les marches du Rite, en occupant diverses présidences, jusqu’à être coopté au sein de la Juridiction pour finalement en 2009 être investi de la titulature de Souverain Grand Commandeur du second Suprême Conseil au monde, s’inscrivant de la sorte dans la lignée du comte de Grasse-Tilly et autres personnages illustres qui ont tout donné pour assurer la défense et la pérennité du Rite Écossais Ancien et Accepté, le plus répandu et le plus pratiqué à la surface du globe.
Au fil de ce que l’on peine à qualifier de « mémoires » tant ces pages respirent l’intemporel et la vie, nous sentons battre le cœur d’un grand Maçon certes, mais surtout d’un homme animé d’une passion, d’un souffle qui le dépasse et le fait entrer en résonance avec ses frères humains et en fusion avec l’absolu. Ce que nous entendons, c’est la voix d’un homme sincère, vrai en toute circonstance, qui n’a jamais triché avec les serments prêtés ou la parole donnée. C’est cette profonde humanité qui fonde l’exemplarité d’un texte auquel chaque initié aura à cœur de se référer tout au long de son cheminement.
Le Livre :
Auteur(s) : Collin Claude
Année de publication : 2022
Format : 14 x 21
Pages : 200
ISBN : 978-2-35662-486-4
17,50 €
Découvrez Les Editions du Mercure Dauphinois
Dans le sillage de son précédent ouvrage, Origine et gouvernance du Rite Écossais Ancien et Accepté par un Grand Commandeur, l'auteur, Grand Commandeur Honoraire du Suprême Conseil de France ...
http://www.lemercuredauphinois.fr/controleur_livres/view/une-vie-au-service-de-ordre-ecossais
Le livre de Claude Collin sur le site de son éditeur
Une Vie au service de l'Ordre Ecossais
Claude Collin, Grand Commandeur Honoraire du Suprême Conseil de France, poursuit ici son devoir de transmission, par l'exemple d'un parcours maçonnique qu'il dévoile par des touches successives ...
https://www.amazon.fr/Une-Vie-service-lOrdre-Ecossais/dp/2356624864
Sur le site d'Amazon
Il manquait très certainement un livre compact, dense, clair et précis concernant l'histoire, la symbolique, les règles, les valeurs et la portée initiatique du Rite Ecossais Ancien et Accepté...
Le premier livre de Claude Collin.
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