Vidéo réalisée le 26 juillet 2021
Vous pouvez admirer au Musée de la Franc-Maçonnerie du Grand Orient de France, la lithographie originale du Serment du Jeu de Paume.
Nous sommes en 1789... Louis XVI, devant l'ampleur de la crise (d'alors) a convoqué les Etats Généraux qui s'ouvrent le 5 mai 1789. Le vote s'effectue alors par ordre : Noblesse (270 députés) , Clergé (291 députés), Tiers-Etat (578 députés), chaque ordre disposant d'une voix. Le Tiers-Etat est donc toujours mis en minorité au vote par ordre alors qu'il a le plus grand nombre de députés.
Le 10 juin 1789, à l'initiative de Sieyès, le Tiers-Etat invite les députés des deux autres ordres à les rejoindre. Certains d'entre eux, des nobles libéraux et des clercs proches du peuple (et souvent franc-maçons...), s'unissent au Tiers.
C'est en clair la suppression des ordres face au roi, auxquels se substitue une représentation nationale en une seule assemblée.
Le groupe ainsi constitué se proclame Assemblée nationale, sur la motion de Sieyès.
Mais Louis XVI résiste et fait fermer la salle des Menus Plaisirs où se réunit l'Assemblée Nationale présidée par Bailly. Devant les portes closes, les députés vont se réunir dans la salle du Jeu de Paume.
L'Abbé Augustin Barruel dans son "Mémoires pour servir à l'histoire du Jacobinisme" publiée à Hamboug en 1798, y verra la preuve du complot maçonnique donc le but est de détruire le trône et l'autel.
Alors que le Grand Orient de France de 1789 rassemble l'armorial de France: Du Grand Maître Philippe d'Orléans (cousin du Roi et futur Philippe-Egalité), les ducs de Noailles, la Trémouille, Rochambaud jusqu'au Marquis de Le Fayette, beaucoup de nobles sont franc-maçons. Certains d'entre eux sont des "américains", qui ont participés à la guerre d'Indépendance américaine (aux côtés des frères Washington et Benjamin Franklin...) et sont gagnés par les idées nouvelles. Ils souhaitent l'avènement d'un monarchie parlementaire à l'anglaise (comme le frère Montesquieu initié en 1730 à la loge londonienne Horn).
Mais reprenons le cours des événements :
A l'initiative du frère Joseph Guillotin, les députés vont se réunir à la salle du Jeu de Paume et les débats se poursuivent sous la direction du frère Jean-Sylvain Bailly (futur 1er maire de Paris). Les nobles libéraux sont là, comme le frère La Fayette, ainsi que de nombreux clercs, comme le frère et néanmoins abbé Emmanuel-Joseph Sieyès ou le frère Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, évêque d'Autun, qui joueront tous deux un rôle essentiel dans les événements à venir.
Le roi somme les députés de quitter la salle. Ironie du sort, c'est le frère Henri-Évrard, marquis de Dreux-Brézé, grand maître des Cérémonies du Royaume, qui se présente le 20 juin 1789 à la salle du Jeu de Paume pour intimer aux députés l'ordre de déguerpir.
C'est à ce moment là que le frère Honoré Gabriel Riqueti, marquis de Mirabeau lui adresse sa réplique cinquante : «Allez dire à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté du peuple et que nous ne quitterons nos places que par la force des baïonnettes !».
Le Moniteur, journal officiel d'alors, en donne une autre version dans son édition du 25 juin 1789. Le frère Mirabeau aurait dit : « Oui, Monsieur, nous avons entendu les intentions qu'on a suggérées au Roi ; et vous qui ne sauriez être son organe auprès des États généraux, vous qui n'avez ici ni place ni voix, ni droit de parler, vous n'êtes pas fait pour nous rappeler son discours. Cependant, pour éviter toute équivoque et tout délai, je vous déclare que si l'on vous a chargé de nous faire sortir d'ici, vous devez demander des ordres pour employer la force ; car nous ne quitterons nos places que par la puissance des baïonnettes», ce qui correspond mieux au langage châtié du frère marquis.
Devant la détermination des députés, le frère Dreux-Brézé quitte la salle et va en référer au Roi...
Les députés présents, signent alors le Serment du Jeu de Paume (rédigé par Jean-Baptiste-Pierre Bevière) où ils jurent de ne pas se séparer sans avoir donner une Constitution au royaume de France. Le 1er député à le voter est le frère Siéyès.
Voici le texte du Serment :
« L'Assemblée nationale, considérant qu'appelée à fixer la constitution du royaume, opérer la régénération de l'ordre public et maintenir les vrais principes de la monarchie, rien ne peut empêcher qu'elle continue ses délibérations dans quelque lieu qu'elle soit forcée de s'établir, et qu'enfin, partout où ses membres sont réunis, là est l'Assemblée nationale ;
Arrête que tous les membres de cette assemblée prêteront, à l'instant, serment solennel de ne jamais se séparer, et de se rassembler partout où les circonstances l'exigeront, jusqu'à ce que la Constitution du royaume soit établie et affermie sur des fondements solides, et que ledit serment étant prêté, tous les membres et chacun d'eux en particulier confirmeront, par leur signature, cette résolution inébranlable. Lecture faite de l'arrêté, M. le Président a demandé pour lui et pour ses secrétaires à prêter le serment les premiers, ce qu'ils ont fait à l'instant ; ensuite l'assemblée a prêté le même serment entre les mains de son Président. Et aussitôt l'appel des Bailliages, Sénéchaussées, Provinces et Villes a été fait suivant l'ordre alphabétique, et chacun des membres * présents [en marge] en répondant à l'appel, s'est approché du Bureau et a signé. [en marge] * M. le Président ayant rendu compte à l'assemblée que le Bureau de vérification avait été unanimement d'avis de l'admission provisoire de douze députés de S. Domingue, l'assemblée nationale a décidé que les dits députés seraient admis provisoirement, ce dont ils ont témoigné leur vive reconnaissance ; en conséquence ils ont prêté le serment, et ont été admis à signer le procès verbal l'arrêté. Après les signatures données par les Députés, quelques uns de MM. les Députés, dont les titres ne sont pas [....] jugés, MM. les Suppléants se sont présentés, et ont demandé qu'il leur fût permis d'adhérer à l'arrêté pris par l'assemblée, et à apposer leur signature, ce qui leur ayant été accordé par l'assemblée, ils ont signé. M. le Président a averti au nom de l'assemblée le comité concernant les subsistances de l'assemblée chez demain chez l'ancien des membres qui le composent. L'assemblée a arrêté que le procès verbal de ce jour sera imprimé par l'imprimeur de l'assemblée nationale. La séance a été continuée à Lundi vingt-deux de ce mois en la salle et à l'heure ordinaires ; M. le Président et ses Secrétaires ont signé. »
Ironie du sort encore.... tous les députés présents signent ce serment... sauf un : le frère Joseph Martin-Dauch, député de Castelnaudary au motif qu'il ne peut jurer d'exécuter des délibérations qui ne sont pas sanctionnées par le roi.
Comme nous le voyons, les francs-maçons se trouvent dans tous les camps et l'on est loin du complot maçonnique invoqué par l'abbé Barruel... Les loges maçonniques ne se réuniront d'ailleurs plus sous la Terreur et de nombreux frères (à commencer par Philippe-Egalité ou Bailly) passeront leur tête à la lucarne de l'invention du frère Guillotin.
En écoutant le rapport du frère de Dreux-Brézé, le roi cède en employant une formule dont il a le secret : « Eh bien, dit-il, s'ils ne veulent pas s'en aller, qu'ils restent ! ».
Le 27 juin, Louis XVI ordonne aux privilégiés des deux autres ordres de se joindre au Tiers, en une chambre unique, l'Assemblée Nationale... Le 14 juillet le peuple prendra la Bastille mais la Révolution a bel et bien déjà commencée ce 20 juin 1789..
Jean-Laurent Turbet
Vous pouvez voir le tableau au Musée de la Franc-Maçonnerie, 16, rue Cadet 75009 Paris en l'Hôtel du Grand Orient de France.
La première version de cet article a été écrite le 20 juin 2006.
Réactualisé depuis.
° Pour aller plus loin :
° Le site du Musée de la Franc-Maçonnerie
° Le 14 juillet, fête maçonnique ? ,sur ce site.
° "La Marseillaise", hymne maçonnique?, sur ce site.
° L'Empire, les Bonaparte et la Franc-Maçonnerie, sur ce site.
° Washington, La Fayette, le Capitole ...., sur ce site.
° Independance Day, sur ce site.
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Je rappelle simplement que la liberté d’expression est en France un droit Constitutionnel, quelle que soit notre appartenance à une association de quelque nature que ce soit.
Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »
Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.
La Constitution et les Lois de la République Française s'appliquent sur l'ensemble du territoire national et s'imposent à tout règlement associatif particulier qui restreindrait cette liberté fondamentale et Constitutionnelle de quelque façon que ce soit.
« Jurez-vous, de plus, d’obéir fidèlement aux chefs de notre Ordre, en ce qu’ils vous commanderont de conforme et non contraire à nos lois ? » (Extrait du Serment prêté par chaque franc-maçon lors de son initiation).
Jean-Laurent Turbet
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