Vu dans "Le Monde" du 7 avril 2006 :
Le Grand Orient de France (GODF), principale obédience maçonnique française, a mis sur pied une "commission de défense de la loi de 1905", qui a tenu ses auditions les 4 et 5 avril à Paris. Elle devrait rendre public un rapport en juin, soit à peu près au moment où la commission de réflexion juridique sur les relations des cultes avec les pouvoirs publics, dite "Commission Machelon", du nom de son président, le professeur de droit Jean-Pierre Machelon, rendra ses conclusions.
Cette dernière avait été mise en place en octobre 2005 par Nicolas Sarkozy, afin de proposer "des ajustements législatifs et réglementaires" au régime des cultes. Le Grand Orient voulait apporter "une réponse laïque" à cette commission "qui ne comprend pas un seul représentant des courants de la pensée laïque".
"GRAND RISQUE"
La commission créée par le Grand Orient comprenait 18 membres, principalement des hauts responsables maçonniques et d'anciens grands maîtres, comme Patrick Kessel ou Jacques Lafouge. Parmi les autres obédiences maçonniques, seule la Grande Loge mixte universelle était représentée par son grand maître, Michel Miaille. La commission ne comprenait que deux femmes : Caroline Fourest, journaliste à Charlie Hebdo, et Nadia Amiri, conseillère technique au cabinet d'Azouz Begag, ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances, proche de Dominique de Villepin.
Invité à participer au débat, Nicolas Sarkozy a décliné l'offre. Ce sont donc ses adversaires politiques qui se sont exprimés et le ministre de l'intérieur a été au centre des débats au cours de ces deux journées d'audition.
Tous ont juré, la main sur le coeur, qu'ils étaient fermement opposés à toute révision de la loi de 1905. Un "toilettage" de la législation serait "un grand risque" a déclaré François Bayrou pour l'UDF. Le socialiste Laurent Fabius a estimé qu'il y avait chez Nicolas Sarkozy "une tentative de confier à des religions des prérogatives de service public, comme l'enseignement, en échange de soutien électoral".
Jean Glavany, qui représentait le premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, s'est montré plus mesuré. Pas question bien sûr de toiletter la loi de 1905. "Ce serait ouvrir une boîte de Pandore extrêmement dangereuse."
Mais le secrétaire national du PS chargé de la laïcité ne voit pas d'inconvénient à ce que des maires financent des locaux annexes à des salles de prière musulmanes, dans le cadre actuel de la loi : "Ce n'est pas détourner la législation que de financer des lieux profanes adjacents à la mosquée, tels qu'un hammam ou une bibliothèque, comme cela s'est fait en 1928 pour la Mosquée de Paris."
M. Glavany a annoncé que les parlementaires PS avaient l'intention de déposer une proposition de loi-cadre sur la laïcité avant l'été. Elle demanderait notamment de "renverser la charge de la preuve pour l'enseignement religieux en Alsace-Moselle", les élèves n'ayant plus à demander une dispense pour ne pas assister aux cours de religion à l'école publique. Elle préconiserait la présence de la libre pensée dans les émissions dominicales du service public de télévision et dans les aumôneries d'hôpitaux ou de prisons. "Mais ne comptez pas sur le PS pour demander l'abrogation du concordat en Alsace-Moselle, a insisté M. Glavany. C'est irréalisable."
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