Comment faut-il comprendre le concept de «laïcité positive» promue par Nicolas Sarkozy?
Elle s'oppose à une laïcité qu'il perçoit comme «fermée» et anticléricale. Pour lui, la laïcité ne doit pas être l'abstention à l'égard des religions mais une ouverture à l'égard des spiritualités. C'est une conception plus américaine que française puisqu'aux Etats-Unis, l'Etat fédéral entretient des relations avec toutes les religions. S'agit-il pour Nicolas Sarkozy de foi, de convictions à affirmer, de réformer, de mœurs à changer ou d'une vie privée à se faire pardonner? On peut hésiter.
Concrètement, que veut-il faire?
Alors qu'il était ministre de l'Intérieur, il s'était prononcé en faveur d'une réforme de la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Il a une nommé une commission, appelée Machelon, qui devait lui formuler des propositions en ce sens. Mais devenu président de la République, en homme politique habile et expérimenté, il fait preuve d'une plus grande prudence car il sait que sur le terrain du religieux, il y a plus de sensibilités à heurter que d'électeurs à gagner. Rouvrir le débat de la laïcité risque d'aboutir à une radicalisation des milieux laïques qui profiterait pleinement à l'opposition socialiste.
Une réforme de la laïcité correspond-elle à une demande sociale?
Chaque religion a ses propres demandes. Les catholiques, qui ont voté massivement pour Nicolas Sarkozy, s'intéressent à la loi scolaire [les questions autour de l'école privée et de son financement] mais les évêques ont par deux fois affirmé qu'ils s'accommodaient parfaitement du statu quo. Les protestants, eux, formulent des demandes pour créer des associations cultuelles quand les juifs et les musulmans veulent une reconnaissance de leurs fêtes religieuses. Mais il existe un risque de surenchère avec les nouvelles religions et les sectes. En banlieue, il y a beaucoup de musulmans mais aussi des évangéliques. La construction de mosquées aboutirait à une concurrence exacerbée entre fondamentalisme biblique et islam radical. On se rend vite compte que lorsque l'Etat veut satisfaire une religion, il doit prévoir une compensation pour les autres. Ceux qui n'ont pas de religions se sentent lésés.
Nicolas Sarkozy a parlé directement de Dieu en Arabie saoudite. Une rupture?
En dehors de formule passée dans le langage courant, comme «si Dieu me prête vie», il n'y a pas un tel exemple au sommet de l'Etat français ces 130 dernières années. Même De Gaulle, catholique pratiquant, se gardait bien de communier durant les messes officielles. C'est un exemple à méditer. Propos recueillis par Alexandre Sulzer
Pour aller plus loin :
° Les ouvrages d'Odon Vallet sur
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