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Le Blog des Spiritualités

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Réforme a 60 ans

Publié par Jean-Laurent Turbet sur 24 Novembre 2005, 23:16pm

Catégories : #Protestantisme, #Réforme

Réforme a 60 ans

Le Magazine "Réforme", hebdomadaire emblématique du Protestantisme français à 60 ans.

 

 

 

Voici l'éditorial de ce numéro anniversaire :

Le premier numéro de Réforme est paru en 1945. Retour sur le parcours d’un média qui a toujours témoigné d’une parole originale, fidèle à l’esprit de ses créateurs, et en contrepoint des bouleversements du siècle écoulé.

par Frédérick Casadesus

 



Au plus près de l’actualité

Le théologien protestant Karl Barth, opposant de la première heure au régime nazi, écrivait qu’« un protestant doit avoir dans une main la Bible et dans l'autre son journal ». Au milieu de la Seconde Guerre mondiale, des protestants français, résistants actifs ou philosophiquement engagés, ont décidé de prolonger leur action clandestine, après le conflit, par la publication d'un nouveau journal. C'est ainsi que Jean Bosc, Albert-Marie Schmidt, Denise Berthoud (la fille du pasteur Boegner) et Albert Finet donnent naissance à Réforme, dont le premier numéro paraît le 24 mars 1945.

Imprégné d'une grande fidélité au général de Gaulle, marqué par la dureté de l'époque – la guerre n'est pas encore achevée –, le premier numéro affirmait ses ambitions : « Notre raison d'être : combattre même avec peu de moyens pour la Justice et la Vérité », écrit le directeur, Albert Finet, dans son premier éditorial. Affirmer ce qu'il pense au risque de bousculer ses lecteurs et de provoquer le débat, tenter d'expliquer le monde, telle est la marque de Réforme. Fortement inspirée par la pensée de Barth, l'équipe des fondateurs estimait nécessaire de conserver l'indépendance du journal vis-à-vis de l'Etat mais aussi indispensable d'intervenir dans la vie politique et sociale du pays. « C'était un peu un déchiffrage de l'actualité du monde, éclairé par notre foi chrétienne », se rappelle Suzon Bosc, la femme de Jean.

Un esprit de liberté

Réforme prend des risques face aux grands événements de l'histoire contemporaine. On a coutume de dire que le journal était alors favorable au général de Gaulle. Certes, la figure du libérateur apparaissait comme la référence des fondateurs. Mais la diversité des opinions s'est toujours manifestée. « Un esprit de liberté régnait sur l'équipe, se souvient François Guiraud, ancien administrateur de Réforme. Certains avaient la fibre politique mais le pragmatisme l'emportait sur l'idéologie. » Par-delà leur sensibilité, le goût de la confrontation des idées rassemblait les rédacteurs.

Dès la Libération, le journal s’élève contre certains excès de l'épuration et encourage les nations à leur examen de conscience. Les premières tensions en Algérie et le soulèvement de Madagascar, le début de la guerre d'Indochine illustrent l'aspiration des peuples colonisés à disposer d'eux-mêmes. Réforme s'engage en faveur de la décolonisation mais laisse le pasteur Boegner publier dans ses colonnes une défense de l'Indochine française en 1953. L'émergence du tiers-monde en tant que force politique trouve également un écho favorable au sein du journal. Mais le radicalisme des positions du président Nasser, allié au soutien enthousiaste que la rédaction manifeste à l'égard d'Israël, conduit Réforme à pratiquer un tiers-mondisme tempéré.

Contre la torture en Algérie

La guerre d'Algérie donne lieu à une tout autre implication. Dès 1956, Réforme révèle les brutalités de l'armée française et dénonce, parmi les premiers supports de presse, la pratique de la torture. Le retour au pouvoir du général de Gaulle n'y change rien. Albert Finet rédige des articles virulents contre l'armée française, au risque de choquer certains lecteurs.

Une fois l'indépendance de l'Algérie acquise, Réforme soutient la construction européenne, considérée comme une alternative à l'impérialisme américain. Sensible à la transformation de la société, le journal épouse son époque : ainsi, quand éclate la crise de Mai 68, Albert Finet et ses camarades prennent leurs distances avec la politique répressive du régime gaulliste et tentent de comprendre le sens profond de la contestation.

Jacques Ellul, qui depuis les origines collabore au journal et met en garde contre les dérives de la société industrielle et l'emprise de la technique sur les êtres humains, trouve une confirmation de ses intuitions dans les changements souhaités par les étudiants – même s'il se défie de leur radicalisme. Réforme s'oppose également au choix de la France de développer l'énergie nucléaire et au surarmement, considérés comme autant de menaces pour l'humanité. Par son appui aux droits des femmes et sa réflexion sur l'éthique familiale, notamment sous l'impulsion de France Quéré et d’André Dumas, le journal participe aux débats éthiques de son époque.

Durant les années soixante-dix, la génération des fondateurs passe le relais. Albert Finet participe aux débats de la rédaction, mais il transmet la direction du journal au pasteur Richard-Molard puis à Bertrand de Luze. Paul Viallaneix lui succède en 1985, puis Michel Leplay en 1991. Ensuite, Jean-Luc Mouton, puis Laurent Gagnebin et Hubert Angliviel de La Beaumelle conduisent Réforme à renouer avec l’esprit de ses origines.

La victoire de François Mitterrand, le 10 mai 1981, provoque bien des discussions : les uns espèrent l'avènement d'une ère nouvelle, les autres ne voient qu'illusions dans le programme du nouveau président. « Nous ne défendions pas une position particulière, se souvient Paul Viallaneix. Simplement, nous refusions la caricature qui présentait les socialistes comme des bolcheviks. Mes éditoriaux s'achevaient le plus souvent par des citations bibliques afin d'encourager les lecteurs à prendre du recul avec l'actualité. Je n'épargnais ni la droite, ni la gauche. »

L'effondrement du système soviétique et son événement emblématique, la chute du mur de Berlin, mobilisent aussi la rédaction. Face à la montée du populisme et de l’extrême droite, contre la résurgence de l’antisémitisme ou l’expression des nationalismes, Réforme a toujours réaffirmé les valeurs portées par le Livre. Si nulle chanson de geste ne vient égayer l’histoire du journal, c’est que les fondateurs de Réforme, nourrissant pour « l’épate » une méfiance naturelle, ont privilégié l’esprit de sérieux, le goût de la rigueur et, par conséquent, la discrétion. Ouvert aux intellectuels (Alfred Grosser, Jean Lacouture, Alain Finkielkraut, Jean Baubérot…), constamment sensible à la culture (sous l'impulsion, dès l’origine, d'Albert-Marie Schmidt et de son fils Joël), Réforme espère encore aiguiser l’esprit critique de ses lecteurs. Offrir des questions plutôt que des réponses.

Frédérick Casadesus

Venez fêter les 60 ans de Réforme du 25 au 27 novembre 2005 au temple de l'Oratoire à Paris

Retrouvez Réfome sur internet : http://www.reforme.net/

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