Les auditeurs de France Culture ont l'habitude d'entendre Alexandre Adler à 8h15 leur parler avec brio des relations internationales.
Historien de renom spécialiste de l'actualité internationale contemporaine, Alexandre Adler nous surprend aujourd'hui en livrant un texte dans un domaine où on ne l'attendait pas. L'histoire de l'ésotérisme français (et un peu international).
L'histoire part du livre de Dan Brown le "Da Vinci Code"... et nous remontons dans le temps... jusqu'à Jésus et Marie-Madeleine.
Il est vrai qu'il faut mieux avoir un certain "background" pour se entir à l'aise dès les premières pages. J'avoue (shame on me) ne pas avoir lu le "Da Vinci Code" (ni avoir tenu jusqu'au bout en regardant le film). Heureusement, la lecture de Robert Ambelain et de quelques autres m'a permis d'être en territoire connu.
Car c'est à un fantastique voyage que nous convie Alexandre Adler, avec sa grande intelligence et son sens de la synthèse et de la mise en concordance d'éléments qui nous avaient parus séparés les uns des autres.
Nous découvrons des personnages pour le moins ambigus comme Pierre Plantard, ésotériste proche de l'extrême droite.
Mais aussi à des personnages plus attachants comme Gérard de Sède, décédé le 29 mai 2004 dans la plus parfaite indifférence des médias. Son parcours est pourtant étonnant : ce journaliste fut l’un des principaux responsables trotskystes en France avant la Seconde Guerre mondiale et dans l’immédiate après-guerre. Résistant, également franc-maçon, ce journaliste au Canard enchaîné pendant plus de 25 ans, fut à l’origine d’un formidable canular mystico-occultiste avec ses ouvrages Les Templiers sont parmi nous (le supposé trésor des Templiers à Gisors), L’Enigme de Rennes-le- Chateau, La Race fabuleuse (Stenay et les rois mérovingiens), dont l’essentiel avait été, en réalité, collationné, voire rédigé, par un professionnel de la mystification dont j'ai évoqué le nom plus haut, Pierre Plantard, connu durant l’Occupation sous le nom de Pierre de France (il dirigea Vaincre, pour une jeune chevalerie), puis, dans l’après-guerre comme Pierre Plantard de Saint Clair, supposé Grand Maître d’un non moins mythique Prieuré de Sion.
Adler décrypte l'énigme de Rennes-le Chateau, parle de l'évéché d'Alet (qui vient du latin electum-élu) et de toute cette région particulière (certains diraient tellurique) - le Razès, au sud du département de l'Aude - et bien sûr de Gisors et des Cathares.
On retrouve également le Prieuré de Sion, les Rose-Croix, la Royal Society, les francs-maçons.
Plus étonnant, les pages très éclairantes sur Vincent de Paul, le Jansénisme (Nicolas Pavillon est l'évèque d'Alet à quelques kilomètres de Rennes le Château). Nicolas Pavillon était, nous dit Adler, un des directeurs de conscience du jansénisme naissant. Le jansénisme qui tentera d'être une voie du milieu entre le catholicisme et le protestantisme et qui s'opposera aux jésuites.
Le peintre Nicolas Poussin, comme le surintendant Fouquet, Blaise Pascal ou bien sûr Isaac Newton sont également longuement cités. Newton, fondateur et âme de la Royal Society (avec Christopher Wren ou Robert Boyle) est la pierre angulaire de la rencontre entre la Rose-Croix et la franc-maçonnerie moderne. Adler dit : "La Rose-Croix s'est ensuite translatée en Angleterre, où elle va se laïciser et donner naissance à la Royal Society, la Société Royale de Londres, première académie nationale des sciences, qui va dominer la vie intellectuelle anglaise dans les années suivantes, et servir de modèles aux autres académies scientifiques sur le continent". Or nous savons que Jean-Théophile Désaguliers, secrétaire particulier et principal collaborateur de Newton, fut le fondateur de la franc-maçonnerie moderne.
La légende Templière est également très présente dans le livre.
Après de belles pages du Léonard de Vinci (évidemment) et Jeanne d'Arc (plus étonnant), Alexandre Adler étudie longuement et précisément la question des relations entre Jésus et Marie Madeleine. Puisque tout part de là.
Que faut il penser d'une postérité entre Jésus et Marie Madeleine ? Les Templiers possèdent-ils un secret de cette nature ? Ce secret se serait il tranmis symboliquement au travers des sociétés secrètes initiatiques?
Et surtout alors que les polémiques furent importantes et très vives dans les premiers siècles (on pense à Celse dont les écrits ont disparus mais dont on connait la teneur grâce à Origène et son Contre Celse) pourquoi, si celà avait été connu, les anti-chrétiens ne se seraient-ils pas immédiatement servis ce cet argument massue de la postérité de Jésus ?
Alexandre Adler avec sa vivacité d'esprit et son humour traque les fausses pistes et les vraies mystifications. Mais pose de vraies questions.
Notamment celle de la persistance, depuis le manichéisme des premiers siècles jusqu'à nos jours, de sociétés initiatiques hétérodoxes, qui perdurent, survivent, face à l'église catholique, monolithique et hégémonique qui tente d'imposer une croyance unique.
C'est un livre passionnant à lire... que de ce fait je vous conseille !!
Avis de l'éditeur:
Il y a de dans les grands secrets de grandes folies, et peut-être une vérité...
À la fin du XIXe siècle, après des années de recherches archéologiques, l'Abbé Saunière fait une découverte inouïe dans son église de Rennes-le-Château. Du jour au lendemain, il devient riche et se lance dans des travaux d'architecture gigantesques et inspirés... Que contenait donc le pilier creux de cette petite église, qui a tant inspiré le Da Vinci Code ? Des reliques ? Un manuscrit précieux ? Le trésor des Cathares recueilli par les Templiers ? La preuve que le Christ a eu un enfant, et que celui-ci vécut en Gaule avec Marie-Madeleine, sa mère ? Alexandre Adler se penche sur cette affaire rocambolesque avec la probité et l'immense culture qu'on lui connaît.
Rennes-le-Château est un cas d'école qui nous rappelle que toute société a ses secrets et ses fantasmes. L'historien remonte dans le temps. Croise les Templiers, les Rose-Croix, les Francs-Maçons. Il raille les sceptiques. Dénonce les affabulateurs. Dans ce livre hors norme, Adler évoque l'Évangile de Jean et son occultation, René d'Anjou le prince des alchimistes, Léonard de Vinci, le fils caché du cardinal Richelieu, Nicolas Poussin, les jansénistes, Cassini et le méridien de Paris, mais aussi Jules Verne, le pape Benoît XV et le légendaire Prieuré de Sion...
Ce livre est inspiré de la série d'émissions qu'Alexandre Adler a produite pour France Culture en 2006, sous le titre : " Histoire de... Da Vinci Code ".
Le Livre :
"Sociétés secrètes" d'Alexandre Adler.
Publié chez Grasset
juin 2007, 318 pages.
ISBN 2246724015
Prix Public : 18,50€
Les plus du blog de Jean-Laurent :
Le N° 108 d'Historia Thématique (Jullet-Août 2007) a pour titre "Les Sociétés Secrètes".
C'est donc un complément bienvenu du livre d'Alexandre Adler.
Ce numéro nous propose d'étudier le sujets en plusieurs parties :
- Les religieuses : Las Cathares, la Kabbale, l'Opus Deï, les sectes.
- Les initiatiques : Les Mystes, les Templiers, La Rose+Croix, La Franc-Maçonnerie, les Skulls&Bones.
- Les politiques : Les Illuminaten, le Ku Klux Klan, la Cagoule.
- Les criminelles : La Mafia, les tiades chinoises, les Yakusas, Al-Quaïda.
A noter: l'article "Les francs-maçons intriguent encore" par le professeur Luc Nefontaine, "Les Illuminaten contre l'obscurantisme" de Pierre-Yves Beaurepaire, tous deux grands spécialistes dans leur domaine.
Et dans le chapitre sur le Ku Klux Klan un étonnant article intitulé "Des origines maçonniques" où l'on apprend que de nombreux dignitaires maçons - dont le général Albert Pike, réformateur du REAA aux Etats-Unis - ont été d'ardents Klanistes.
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Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.
La Constitution et les Lois de la République Française s'appliquent sur l'ensemble du territoire national et s'imposent à tout règlement associatif particulier qui restreindrait cette liberté fondamentale et Constitutionnelle de quelque façon que ce soit.
Jean-Laurent Turbet
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