Mon père, Edmond Gabriel Turbet, est né à La Machine dans la Nièvre, le 21 juin 1918.
Ses parents avaient quitté la Nièvre bien des années plus tôt pour aller travailler à Paris.
Ma grand-mère, Juliette, était née en 1880, mon grand père, Antoine, quelques années avant encore.
Ils étaient concierges à Paris dans un immeuble des beaux quartiers et ne manquaient de rien. Surtout pas de vêtements ou de chaussures que les locataires leur donnaient à peine portés.
Aux début de 1918, les Pariser Kanonen allemands (improprement appelés "Grosse Bertha") bombardent Paris. Ce sont des canons capables de tirer à plus de 120 kilomètres. Les parisiens sont effrayés.
Ma grand-mère, enceinte, décide de se mettre à l'abri et d'aller accoucher dans la Nièvre chez ses parents. C'est ce qui sera fait.
Mon père naît le 21 juin 1918 à La Machine, ville minière de la Nièvre (qui abrite aujourd'hui le Musée de la Mine). Son frère André a 5 ans de plus que lui. La sœur aînée, Blanche, dont tout le monde dans la famille louait l'intelligence, est morte subitement d'une méningite à 7 ans. J'ai vu des lettres remarquables écrites de sa main, conservées par la Tante de mon père, la jeune sœur de sa mère (elle avait 15 ans de moins), Anna, dite "Tante Nana".
La tante Anna s'est mariée "avant guerre", c'est à dire en juillet 1914. A l'époque où une paire de poulets achetés au marché vaut 5 sous.
Antoine et Juliette Turbet ne retourneront jamais à Paris. Juliette reste au foyer à élever ses deux fils. Antoine a trouvé un emploi à la mine. Il transporte les résidus de charbon sur les terrils près de l'étang Grainetier.
Edmond est un jeune écolier parfois buissonnier. Il se rappelle que son père lui a donné une fessée avec des orties en rentrant un soir car il l'avait surpris en train de nager à l'étang Grainetier au lieu d'aller à l'école.
Mon père se rappelle aussi de ses instituteurs, les hussards noirs de la République. L'un d'eux faisaient des tractions d'un seul bras sur la branche d'un arbre, en costume et manteau noir, sa sacoche dans l'autre main. Il leur demandait de boire de l'eau ferrugineuse pour être plus forts. Les enfants faisaient rouiller des clous dans des bidons et en buvaient l'eau.
Alors qu'André vient de partir faire son armée (deux ans...), le père, Antoine, meurt la tête serrée entre les tampons de deux wagonnets. Mon père me dira que son crâne n'était pas écrasé. Il le revoir mort, intact. Antoine est mort d'un coup , frappé sur les tempes.
Sa mère, Juliette, le lendemain de l'enterrement de son mari, va voir le directeur de l'usine, M. Salins. Edmond, 15 ans est évidemment à ses côtés. Il a commencé son apprentissage de menuisier à 13 ans, après l'obtention de son certificat d'études.
Juliette demande au directeur d'embaucher Edmond comme menuisier à la mine. En effet son mari est mort à 52 ans et son fils aîné fait son service militaire. Elle est donc sans ressource aucune.
M. Salins lui demande : "Votre fils a étudié dans quelle école ?". Juliette répond : "A l'école communale". Le directeur lui répond : "Alors il ne sera pas menuisier mais mineur de fond. Les emplois "de jour" son réservés à ceux qui sont allé à l'école libre. Pour les élèves de l'école communale, c'est le fond". L'école libre, c'est à dire l'école catholique, l'école des curés comme on dit alors. J'ai fait ma scolarité à l'école publique. Mes enfants aussi. Il reste peut-être quelque chose de l'histoire familiale...
Mon père se souviendra toute sa vie de sa mère en larmes quittant le bureau du directeur. Elle vient de refuser que son fils travaille au fond de la mine. Elle vient de perdre son mari, elle ne veut pas perdre son fils à la mine.
Mon père va rapidement travailler chez un cousin qui tient une menuiserie à Decize, Maurice Renon, avant de partir travailler chez un menuisier à Pouilly-sur-Loire. Il y fabriquera essentiellement des tonneaux, bien utiles pour ces producteurs de vin blanc de Pouilly Fumé.
Il faut faire 60 kilomètres à vélo entre La Machine et Pouilly. Edmond vit la semaine à Pouilly dans une chambrette. Il revient le samedi à vélo à La Machine.
Le samedi soir il joue du banjo et/ou du violon dans un petit orchestre musette pour se faire un peu d'argent en plus. Evidemment l'argent du bal comme l'argent de sa paie il le donne à sa mère, ne gardant pour lui que de quoi payer sa chambre et à manger la semaine.
Jusqu'à son service militaire il en sera ainsi.
Mon père a commencé à travailler à 13 ans en 1931. Il prendra ses deux premières semaines de vacances en 1936 après la victoire du Front Populaire de Léon Blum. Il restera socialiste de cœur (pas encarté), toute sa vie. Il achètera longtemps l'Unité le dimanche sur le marché. Il gardera toute sa vie une admiration pour Léon Blum, Pierre Mendès-France et François Mitterrand.
En juin 1938 mon père part au service militaire, pour deux ans lui aussi. La première année il fait ce que font tous les menuisiers incorporés : des meubles pour le régiment et les officiers.
Le 2 septembre 1939 la guerre est déclarée à l'Allemagne. S'en suit la drôle de guerre où rien ne se passe...
En juin 1940 le régiment de mon père est envoyé en Belgique en soutien du régiment de chars de de Gaulle. La seule offensive française de la guerre...
Alors qu'il est dans une tranchée derrière un char en train de tirer avec son fusil, une rafale de mitraillette vient le faucher.
Trois ou quatre balles dans le gras gauche. Une balle dans la joue gauche (il en gardera une trace à vie). Une balle dans la tête qui miraculeusement glisse sous le casque. Il est KO. Quand il se réveille il s'aperçois que son bracelet portant son nom et matricule est cassé en deux. Un soldat passant dans le coin l'a pris pour mort et a envoyé le bout de bracelet au régiment pour qu'il soit déclaré mort.
Il met son bras blessé dans son ceinturon et fait quelques centaines de mètres à pieds avant d'être récupéré par un camion. Celui-ci l'emmène dans un hôpital mais qui est bondé, puis dans un deuxième également bondé. Au troisième hôpital un chirurgien le prend en charge. Mon père lui indique qu'il peut encore bouger les doigts de sa main gauche. Le chirurgien lui demande de ne pas s'en faire avant de l'endormir au chloroforme. Mais le chirurgien n'a pas le temps de passer plusieurs heures à soigner le bras de mon père. D'autres blessés attendent...
Quand il se réveille mon père est amputé du bras gauche. Il est désespéré. Il a 22 ans. Il est menuisier. Il est très sportif. Il est musicien. Il a l'impression que sa vie s'arrête, s'écroule, et que le monde n'est que chaos autour de lui.
Il va rapidement être transféré dans une école de rééducation près de Limoges. Il lui faut apprendre à vivre avec un seul bras.
Il lui faut aussi reprendre des études. Il a quitté l'école à 13 ans . Pas question pour lui d'être gardien de square toute sa vie, ou d'avoir un emploi réservé équivalent, destiné aux mutilés de guerre.
Alors il suit des études de comptabilité pour être comptable puis expert comptable. Il lui faut redoubler d'effort. Il est difficile de reprendre des études à 23 ans après avoir passé son certificat d'études 10 ans auparavant.
Au printemps 1942 une surprise l'attend. Un soir on sonne à sa porte. Un homme barbu, crotté, sale, le demande. C'est le Capitaine de son régiment qui a déserté le régiment de l'armée de Vichy auquel il avait été incorporé après la défaite. Ce capitaine veut rejoindre l'armée de de Gaulle en Angleterre. Il lui faut pour cela passer la ligne de démarcation.
Mon père va le "planquer" plusieurs mois chez lui. Grâce à un réseau de Résistance, son Capitaine va pouvoir gagner l'Espagne puis Londres.
Mon père "planquera" ainsi l'argent de la Résistance, des militaires alliés et des juifs comme son ami Mexler qui sera tailleur à Paris et qui lui fera tous ses costumes sur mesure (à cause de son bras). Il a fallu attendre deux ans avant sa mort pour que mon père m'en parle.
Jamais je n'ai entendu Mexler et mon père parler de la guerre lors des nombreuses soirées qu'ils passeront en famille à jouer aux cartes. Mexler va se marier en seconde noces avec la meilleure amie de ma mère. Jamais un mot. Mon père m'a toujours dit que Mexler était un copain. Et quand je lui ai demandé s'il n'était pas un peu juif et si ce n'était pas pour ça qu'il le planquait, il m'a répondu sobrement oui. Mais pour lui ça n'avait pas d'importance. Il avait sauvé un ami. Juif ou non il s'en moquait. Ils n'ont jamais parlé de ça par la suite. Ils ne parlaient que des vacances à venir, de la joie de se retrouver, de bien manger, de boire un bon vin et de faire d'interminables parties de Canasta.
Mon père a la frayeur de sa vie dans la nuit du 10 juin 1944. Il habite dans la banlieue de Limoges. Au milieu de la nuit des cris, des hurlements. Il allume la lumière dehors. Une rafale de mitraillette détruit le luminaire.
Un SS entre dans son appartement en enfonçant la porte d'un coup de pied, son fusil à la main, les yeux injectés de sang, dans une fureur absolue. Mon père torse nu lève les bras, enfin son bras puisqu'il ne reste qu'un moignon de son bras gauche.
Le SS qui le met en joue lui demande "Krieg?" en montrant son moignon. Mon père lui répond "oui". Le SS baisse son fusil et s'en va.
Mon père apprendra bientôt que ce sont des SS de la division Das Reich qui viennent de commettre le massacre d'Oradour-sur-Glane. 642 habitants, dont 247 enfants, sont abattus ou brûlés vifs par les hommes du 1er bataillon du 4e régiment Der Führer de la 2e Panzerdivision SS Das Reich. Mon père prendra le lendemain des photos du village martyr. Sans jamais évidemment photographier les corps suppliciés des victimes. J'ai encore ces photos.
En 1944 le Capitaine de mon père reviendra en France avec l'Armée de Leclerc. Il deviendra Colonel puis Général. Il ira voir ma Grand-Mère à La Machine en remontant vers Paris, pour avoir des nouvelles de mon père.
Il va le retrouver en 1945. Mon père a alors trouvé un emploi à la SNECMA. Le Général lui dit : "Turbet démissionnez immédiatement, je suis nommé à la Marine, vous venez avec moi". Mon père le suivra. Il travaillera longtemps au Ministère de la Marine.
Plus tard ce Général sera nommé au Contrôle Général des Armées. Il finira Contrôleur Général des Armées. Mon père travaillera avec lui toute sa carrière comme personnel civil (équivalent du grade d'adjudant chef) au Contrôle Général des Armées. Il s'occupera notamment des comptes du Fort de Brégançon et des comptes de la Présidence de la République notamment.
Lors du pot de départ à la retraite de mon père, en 1978, au Ministère, le Général me prit à part. J'avais 14 ans. Il me dit : "Si, pour votre service militaire, dans quelques années, vous avez besoin de quelque chose, appelez moi. Car voyez-vous, j'ai une dette envers votre père, une dette que je ne pourrai jamais lui payer, car je lui dois la vie".
Ayant fait une préparation militaire qui me permit de choisir mon affectation, je n'ai pas eu besoin d'appeler le Général. Mais ses paroles restent à jamais gravées dans ma mémoire.
Une petite revanche pour mon père : En 1948, la société minière de La Machine a besoin de bras et elle manque de cadres après la guerre alors que la production de charbon bat son plein. Le Directeur Salins est toujours directeur, comme en 1933 à la mort de mon grand-père. Il demande à mon oncle André, alors eployé de la Mine, si mon père, devenu expert comptable à Paris, ne veut pas venir travailler à la Mine de La Machine. Salins lui promet un salaire à l'avenant et des conditions particulièrement avantageuses. André est chargé de jouer les intermédiaires et de faire part de la proposition du directeur à mon père.
Mon père répond simplement à son frère : "Puisque tu travailles à la mine, tu diras à Salins que je le remercie beaucoup de sa proposition mais que c'est non. Mais si tu n'avais pas travaillé à la Mine, peut-être qu'il ne me reste qu'un seul bras, mais je le lui aurais mis à travers la figure". Mon père ne lui pardonnera jamais les larmes de Juliette, l'injustice et la pauvreté qui ont suivi. Il ne travaillera jamais à la mine. Il voit ses copains de jeunesse devenus mineurs : un métier de forçat me dit-il.
Mon père a été décoré dans l'Ordre de la Légion d'Honneur. Chevalier, puis Officier. Il a également été décoré de la Croix de Guerre, avec palmes, et de la Médaille Militaire.
Mais il fréquentaient peu les anciens combattants. Surtout ceux qui disaient "ce qu'il faudrait aux jeunes, c'est une bonne guerre". Lui, la guerre il l'avait faite et il ne la souhaitait pas aux jeunes. Il était abonné à L'Amputé de Guerre et au Canard Enchaîné.
Il se rendait parfois au banquet du réseau de résistance auquel il avait participé ainsi qu'à celui de Stéphane Gros, son cousin par alliance, commandant de Police à Marseille. En présence de la Maréchale de Lattre de Tassigny souvent.
Il allait aussi tous les 28 juin à Dun-les-Places dans la Nièvre pour la commémoration de l'assassinat des 27 victimes des SS. C'est là que - pour la seule et unique fois de ma vie, en 1981 - j'ai vu le président François Mitterrand.
J'arrivais parfois à le traîner avec insistance à un défilé du 8 mai ou du 11 novembre à Levallois ou à Clichy. Mais c'était surtout pour lui une occasion de discuter ensemble en marchant. Il n'était pas un grand fana des commémorations militaires. Trop de mauvais souvenirs certainement.
Deux petites anecdotes :
- Mon père a reçu sa médaille d'Officier de la Légion d'Honneur en 1952 en l'Hôtel des Invalides lors de la même cérémonie qui voyait la décoration d'Ali Khan alors marié à Rita Hayworth. Ma mère et lui s'attendaient à voir apparaître Gilda, mais ils ont vu une dame élégante à chignon, en tailleur sobre noir et talons plats. Loin de l'image de la star hollywoodienne qu'elle était alors. Ma mère en fut légèrement déçue.
- Mon père se voyait parfois confié des missions confidentielles par le Ministère des Armées. Un jour, quelques mois avant sa mort, il a reçu une lettre officielle lui indiquant qu'il était relevé du secret défense. Incidemment, il m'a dit qu'il avait été envoyé "en vacances" au Maroc en novembre 1965. Une personne avait mis quelque chose dans son "bras gauche" à Paris, une autre personne était venu prendre ce quelque chose à Marrakech quelques jours plus tard. Est-ce que cela avait à voir avec la disparition de Mehdi Ben Barka? Il ne l'a jamais su. Et nous ne le saurons sans doute jamais... Je sais que ma mère lui a interdit par la suite de faire d'autres missions de ce type.
Mon père a rencontré ma mère, Simone Charpentier, en 1946 et ils se sont mariés en 1948. Ils ont tenté vainement pendant des années d'avoir un enfant. C'est lorsqu'ils ne s'y attendaient plus que je suis né, fils unique, le 24 septembre 1964. Mon père avait 46 ans, ma mère 42.
Il me disait toujours qu'à cet âge là ils ne verraient jamais leurs petits enfants. Ils étaient pourtant tous les deux en grande forme lors de notre mariage avec Sophie le 1er juin 1991 (ils vont même organiser un "deuxième mariage" en août avec la famille de la Nièvre).
Mon père verra non seulement son petit-fils, Elliott, né le 9 septembre 1992 - jour anniversaire des 70 ans de ma mère- , mais également sa petite fille Eleonor, née le 11 mars 1996.
Ma mère, dont les médecins avaient dit qu'il ne lui restait que quelques jours à vivre à la Noël 1995, a attendu et a tenu jusqu'à la naissance de sa petite-fille, pour la voir. Elle est morte le 31 mars 1996. 20 jours après la naissance de sa petite fille.
Mon père connaîtra les affres de la dépression après la mort de sa mère, Juliette, en 1970.
Juliette qui me disait avoir vue en une seule vie à la fois les voitures à chevaux, les vélos, les bougies, les lampes à pétrole, l'électricité, les voitures, le frigo et enfin l'homme marcher sur la lune depuis son fauteuil, dans sa télé.
Elle qui se souvenait d'avoir vu le Wild West Show de et avec le vrai William "Buffalo Bill" Cody en 1905 à Paris (elle avait 25 ans).
Buffalo Bill, ses indiens et ses cow-boys (prononcez cove-boie avec l'accent morvandiaux de ma grand-mère).
Les affres de la dépression car - peut-être - les fantômes de la guerre, les blessures, les traumatismes qui ne furent pas soignés du tout, remontèrent parfois un peu à la surface de temps en temps...
Lui qui aimait par dessus tout son fils (votre serviteur), sa belle-fille et ses petits enfants. Surtout ses petits enfants qui furent la vraie lumière des dernières années de sa vie. A qui il vouait une admiration sans borne et un amour sans limite.
Lui qui aimait, quand j'étais jeune, accueillir les copains à la maison à Levallois. Hocine (Aomar) mon copain d'enfance à La Machine. Didier (Oudry) et Christophe (Nivet) mes copains de collèges. Malek (Boutih) et Stéphane, qui deviendra mon beau-frère, mes copains de lycées. Il y avait toujours à manger (ma mère y veillait) et le jeu de carte était toujours prêt à être dégainé. Combien de parties de cartes (Belote, Tarot, Barbu...) ont été faites sur la grande table de la salle à manger de leur appartement au 3ème étage du 18, rue Marius Aufan à Levallois.
Une seule chose lui importait. Que je réussisse mes études. La peur de celui qui avait dû quitter l'école très jeune. Pour lui, rien de plus important que d'écouter ses maîtres, ses professeurs et surtout de lire. Lire passait avant tout. Apprendre, connaître, étudier. Là pour le coup il m'en reste quelque chose... Le savoir était pour lui la clef de la réussite.
Bref j'ai vécu une enfance et une adolescence heureuse et libre. Une vie ordinaire avec ses hauts et ses bas. Mes parents de 65 ans étaient plus tolérants avec moi que beaucoup de parents de 40 quand j'avais 18 ans.
Mon père est mort paisiblement chez lui, au 46, rue Gabriel Péri à Levallois, durant sa sieste en fin d'après-midi du 5 novembre 2001. Depuis ce jour je suis orphelin. Il est enterré au cimetière de La Machine avec ma mère.
Elliott conserve toujours chez lui la petite boite qui contient ses médailles. Et le bracelet cassé de juin 1940. Eleonor se souvient un peu de son grand-père, heureusement car elle n'a pas pu connaître sa grand-mère à qui - pourtant - elle ressemble tant. Comme si ma mère avait attendu pour lui passer le flambeau. Pour lui transmettre son enthousiasme de la vie, son énergie, son dynamisme. Eleonor a souvent les mêmes expressions que ma mère, alors qu'elle ne l'a jamais connue.
Mes parents ont eu une vie simple de gens bons et généreux à qui la vie n'avait pas toujours fait de cadeaux. Ils vivaient bien sans être riches mais en pouvant se permettre d'être généreux. Avec une certaine aisance de ceux qui ont travaillé toute leur vie. Eux qui savaient toujours espérer le meilleur pour leurs enfants et petits enfants, peut-être parce qu'ils avaient connu le pire étant jeunes.
Ils passaient souvent les vacances d'été à La Machine avec mon oncle et ma tante, André et Laurence qui m'avait gardé toute mon enfance lorsque mes parents travaillaient, avec Patricia, qui est comme ma soeur.
Bizarrement je n'ai jamais considéré mon père comme un handicapé. Même si son faux bras pendait derrière la porte. Même si c'était sympa de prendre le train en tarif réduit 1/4 de places. Même si c'était pratique qu'il se gare sur les places réservées aux handicapés grâce à son macaron GIG de grand invalide de guerre.
C'est sa mémoire que je souhaite honorer aujourd'hui. Le jour de ses 100 ans.
Je suis heureux qu'il soit né le jour du solstice d'été et le jour de la fête de la musique, qu'il aimait beaucoup. Lui le petit joueur de violon et de banjo des bals musette de la Nièvre des années 30. Je n'ai jamais joué de violon ou de banjo. Je ne joue que de la batterie.
Je lui dois d'aimer les films en noir et blanc et d'avoir comme vedettes de cinéma Pierre Fresnay, Pierre-Richard Wilm, Jean Gabin, Pierre Brasseur, Charles Boyer, Raimu, Harry Baur, Robert Le Vigan, Marcel Dalio, Albert Préjean...
Je lui dois d'aimer Léon Blum et Mendes-France. Et Rocard. Et les contre-pétries.
Où qu'il soit je sais qu'il nous regarde. Qu'il me regarde.
Et qu'il nous envoie toujours beaucoup d'amour.
Alors ce soir, avec les enfants, on boira une coupe de champagne à la mémoire de Pépé. Pour fêter ses 100 ans comme il se doit.
Jean-Laurent Turbet
Le "Blog des Spiritualités", est un site d'information libre et indépendant traitant de spiritualités, de symbolisme, d'ésotérisme, d'occultisme, d'hermétisme, d'Initiation, de religion, de franc-maçonnerie, de mouvements spirituels, etc...
Chaque contributeur ou contributrice, écrit en son nom personnel. Il ou elle signe ses articles.
Chaque signataire d'article est responsable de l'article qu'il rédige.
Sauf mention contraire explicite, chaque contributeur n'écrit ni au nom d'une association, ni d'un parti politique, ni d'une obédience maçonnique, ni d'une loge maçonnique, ni d'un mouvement spirituel... Mais bien en son nom personnel.
Les propos des signataires d'articles n'engagent qu'eux.
et non pas l'une ou l'autre des associations dont ils sont éventuellement membres.
La liberté d’expression est en France un droit Constitutionnel, quelle que soit notre appartenance à une association de quelque nature que ce soit.
Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »
Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.
La Constitution et les Lois de la République Française s'appliquent sur l'ensemble du territoire national et s'imposent à tout règlement associatif particulier qui restreindrait cette liberté fondamentale et Constitutionnelle de quelque façon que ce soit.
La Rédaction du Blog des Spiritualités
Pour tout contact : Redaction@jlturbet.net
Commenter cet article