Les cérémonies de commémoration du bicentenaire du Consistoire débuteront le jeudi 15 juin 2006 à l'occasion du grand dîner de gala du Consistoire de Paris Ile de France à l'Hôtel de Ville de Paris.
Il y a exactement deux siècles, le 30 mai 1806, était convoquée la première assemblée des notables juifs qui devait initialement se tenir le 15 juin 1806 à la Mairie de Paris. Il s'agissait alors de la première étape de l'acte fondateur de ce qui deviendra le grand Sanhédrin puis le Consistoire.
A l'occasion du lancement des cérémonies du bicentenaire du Consistoire, l'ensemble des Présidents des communautés juives de Paris et d'Ile de France, des Rabbins, des Maires, de toutes sensibilités politiques et des dirigeants des principales institutions juives, ont été réunis autour du Maire de Paris Bertrand Delanoë, du Grand Rabbin de Paris David Messas et du Président du Consistoire de Paris Joël Mergui.
Le Consistoire, la plus ancienne des institutions juives de France, a pour tâche première d'organiser le culte et la représentation de la communauté juive. Depuis maintenant deux siècles, fidèle à sa mission et à sa tradition, le Consistoire de Paris développe et assure au quotidien tous les services garantissant les intérêts de la vie juive : des lieux de culte à linstruction religieuse, de la célébration des mariages à l'abattage rituel.
Hier, aujourd'hui comme demain, le Consistoire a été, est, et sera, au coeur de la vie de chaque juif.
Je vous propose de lire le discours prononcé par Joël Mergui diamanche lors de la réception :
Monsieur le Maire de Paris, Monsieur Bertrand Delanoë, Monsieur Le Président du Consistoire de France, cher Jean Kahn,
M. le Grand Rabbin de France,
M. le Grand Rabbin de Paris,
Madame le Ministre,
Monsieur le Ministre,
Monsieur l’Ambassadeur de France en Israël,
Monsieur le Président de l’association des Maires d’Ile de France,
Mesdames et Messieurs les élus,
Madame la Vice-Présidente de la Région Ile de France,
Madame la Représentante du Préfet de Police,
Messieurs les Préfets,
Messieurs les Présidents des Conseils Généraux,
Monsieur le Représentant de Monseigneur André Vingt Trois,
Messieurs les Grands Rabbins et Rabbins,
Messieurs et Mesdames les Membres du Consistoire de Paris et du Consistoire Central,
Messieurs les Présidents des Consistoires Régionaux,
Messieurs les Présidents des Communautés de Paris, Banlieue et Province,
Madame la Directrice de la FMS,
M. le Directeur du CRIF,
Messieurs les Présidents et Directeurs d’Institutions,
Mesdames et Messieurs les Intervenants,
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
C’est avec beaucoup d’émotion que j’ai l’honneur d’introduire ce bicentenaire du Grand Sanhedrin, inaugurant ainsi les commémorations du bicentenaire des Consistoires que nous célébrerons en 2007 et 2008.
La présence dans ce lieu prestigieux d’une assistance si nombreuse et d’intervenants d’une telle qualité prouve - si besoin était – que l’institution qui représente et fait vivre la communauté juive depuis 200 ans, à savoir le Consistoire, au-delà d’être au cœur de la vie de chacun des juifs de France, est également au cœur de la société française. Et c’est peut-être déjà là le fait majeur qu’il convient de marquer et de célébrer aujourd’hui.
Je souhaiterai tout d’abord remercier chaleureusement le Président de la République, Monsieur Jacques Chirac, d’avoir accepté de placer sous son haut patronage cette cérémonie, soulignant ainsi avec force l’enracinement de la communauté juive dans la République française et les liens particulièrement étroits qui les unissent dans cette Histoire si riche qu’elles écrivent ensemble depuis 200 ans.
Je tiens également à vous remercier, Monsieur le Maire de Paris, cher Bertrand Delanoë, ami fidèle de la communauté juive, pour avoir accepté que cette cérémonie se déroule ici, à l’Hôtel de ville de Paris, à l’endroit même où le Grand Sanhédrin a été réuni en mars 1807. Par le soutien que vous apportez à cette initiative, vous confirmez toute l’attention que vous portez à notre Communauté, comme vous le faites dans les multiples tâches liées à votre fonction et qui nous amènent si souvent à travailler ensemble.
Merci enfin à tous ceux qui ont contribué au succès de cette journée. Et en particulier aux prestigieux orateurs, qui par leur savoir et leurs analyses, nous permettront de partager un moment d’histoire et de réflexion sur un thème qui nous passionne tous et porteur d’enseignements majeurs pour notre avenir commun : les juifs de France et la République.
Voilà donc très exactement 200 ans, presque jour pour jour, Napoléon 1er réunissait ici à l’Hôtel de Ville de Paris, le Grand Sanhédrin avec un projet ambitieux : « Le Sanhédrin, tombé avec le Temple de Jérusalem, va reparaître pour éclairer par tout le monde le peuple qu’il gouvernait… »
Il créait ainsi le fondement de ce qu’allait devenir un an plus tard le Consistoire véritable ossature de la Communauté juive de France.
Au cours de cette convocation historique, douze questions majeures furent posées à l’Assemblée présente, portant sur l’organisation, la vie et la fidélité de la Communauté juive. Nous avons tenu à remettre en lumière aujourd’hui cette page mal connue et pourtant déterminante de notre histoire et de notre engagement.
C’est sous la direction rigoureuse et diplomatique du Grand Rabbin David Sintzheim que des réponses furent apportées après plusieurs semaines de débats et discussions. Ces réponses constituent ce que l’on peut qualifier de « pacte » unissant les juifs de France à la République alors naissante.
Ce pacte fondateur issu du Grand Sanhédrin, instituant la Communauté juive comme partie intégrante de la République, n’était pas qu’une simple déclaration d’intention.
Il est resté de mise pendant 200 ans.
Il prévaut encore aujourd’hui.
Et pourtant. Pendant ces 200 ans, l’histoire commune des juifs et de la France a eu ses pages sombres : Le Capitaine Dreyfus. L’occupation. Les dénonciations. Le Vel d’Hiv. La Shoah.
Et pourtant. Pendant ces 200 ans, malgré ces injustices et ces souffrances, les juifs de France n’ont jamais remis en cause le pacte conclu en mars 1807.
Pendant ces 200 ans, les juifs de France, organisés en communauté constituée et structurée sous l’égide du Consistoire, ont fait preuve en toutes circonstances, et malgré tout, d’une triple fidélité.
Fidélité aux lois et aux valeurs de la République.
Jamais les juifs de France ne les ont remises en cause ou même discutées. Plus encore, Ils ont compté parmi les plus grands initiateurs, pourfendeurs, défenseurs de ces lois et de ces valeurs : justice, droits de l’Homme, laïcité, liberté, égalité, fraternité.
Les juifs de France ont toujours été de ces combats.
Fidélité à la Patrie.
Jamais les juifs de France n’ont fait défaut à leur pays et à leurs concitoyens. Plus encore, ils ont toujours répondu présents à la France et à son histoire. De la Grande guerre, aux réseaux de résistance, en passant par la vie politique, économique, scientifique ou culturelle. Les juifs de France ont sans exception fait face à leur responsabilité. Malgré la Shoah et les 76000 juifs de France tués parce que juifs, la communauté juive de France est aujourd’hui la seule en Europe a avoir autant grandi après la guerre, sur les lieux même de l’Horreur. Peut-on imaginer une plus grande preuve de fidélité et de confiance en son pays ?
Fidélité à leur foi et à leur Histoire.
Jamais les juifs de France n’ont renié leurs valeurs, leurs traditions, leur culture. Plus encore, ils ont constitué un apport incomparable, incontournable et incontestable au judaïsme et au Peuple juif dans son ensemble. Nos communautés sur cette terre depuis près de Deux mille ans, organisées et structurées dans l’institution consistoriale depuis deux siècles, n’ont jamais cessé d’étudier, d’expliquer, d’enseigner et d’éduquer. Nos rabbins, nos synagogues, nos écoles, ont forgé et formé à travers le temps plusieurs générations de juifs fiers de leur Peuple, de la Terre de leurs ancêtres, de leur Torah. Fiers de leur judaïsme et soucieux de le transmettre à leur tour.
Preuve s’il en fallait de la complète compatibilité de notre foi avec la loi du pays.
Je voudrais ici rendre un hommage appuyé à tous nos prédécesseurs : Présidents, Rabbins, Grands Rabbins qui pendant deux siècles ont fait vivre et exister notre institution. Monsieur Jean Kahn, merci pour votre contribution essentielle à la France et au Judaïsme français.
Voilà 200 ans que le Consistoire respecte scrupuleusement le contrat conclu en mars 1807 entre les juifs et Napoléon 1er.
Voilà 200 ans que les juifs de France contribuent à la construction de leur pays, tout en protégeant, en développant et en vivant leur foi, leur culture et leurs traditions.
Voilà 200 ans que dans le cadre du Consistoire vecteur essentiel et incontournable d’intégration, les juifs de France respectent leur passé et construisent leur avenir.
C’est pourquoi le Consistoire demeure aujourd’hui l’Institution juive la plus ancienne de France et d’Europe, aussi représentative, aussi active et aussi vivante.
Depuis deux siècles, c’est toujours vers notre institution que les juifs français se tournent pour leur vie religieuse et communautaire, l’éducation spirituelle, les mariages ou les divorces, les obsèques, l’alimentation cachère. C’est en son sein que les forces armées trouvent leurs aumôniers israélites, les hôpitaux leurs visiteurs et leurs conseillers religieux.
200 ans après, l’heure doit être au bilan et aux projections vers l’avenir.
En deux siècles, et malgré les vicissitudes de l’Histoire, la communauté juive de France a changé, a grandi, a mûri. Elle fait face aujourd’hui à de nouveaux besoins, à de nouveaux défis qui l’engageront pour les décennies à venir.
Le Consistoire, vieille dame des institutions juives de France, à l’origine de la plupart d’entre-elles, possédant la sagesse et l’expérience que son âge lui confère, mais également la vitalité et la force que ses membres lui apportent, le Consistoire devra donc répondre à ces besoins et relever ces défis.
Il l’a fait hier ; il le fait aujourd’hui ; il le fera demain.
C’est avec vous tous que nous y parviendrons, pour engager ce nouvel élan, pour construire la communauté juive de nos enfants.
Avec l’ensemble des institutions juives de France.
Ce n’est qu’unissant à nouveau nos forces, nos ressources, nos atouts, que nous parviendrons à construire les bases de la Communauté juive pour les siècles à venir et être ainsi les dignes héritiers des sages du Grand Sanhédrin.
Mais également avec les pouvoirs publics et l’Etat.
Les juifs de France font à nouveau face depuis peu au retour des doutes, des craintes et des peurs.
Les actes antisémites ont ressurgi d’un autre âge. Aucune faiblesse ne pourra être admise dans la lutte acharnée contre ce fléau. L’actualité nous démontre malheureusement chaque jour que cette guerre-la est encore loin d’être gagnée.
Dans le même temps, la liberté du culte et la garantie des pratiques du judaïsme ne doivent souffrir d’aucune concession.
Il en va du bon vivre des juifs dans notre pays.
Les droits n’existent que parce qu’en découlent des devoirs.
Le devoir d’avoir, depuis 200 ans, respecté le pacte républicain confère aux juifs de France le droit d’être exigeants et vigilants quant à leur avenir.
C’est parce que la Communauté juive n’a jamais, dans le passé, douté de sa responsabilité envers la nation, que la République ne devra jamais, dans l’avenir, transiger sur la sienne envers le judaïsme.
Deux siècles après la convocation du Grand Sanhédrin,
Deux siècles après l’instauration de ce pacte républicain historique,
Deux siècles après une histoire commune passionnée, passionnelle et passionnante,
Le Consistoire, les juifs et la République ont à nouveau rendez-vous avec l’Histoire.
Nos enfants nous regardent, nous écoutent et nous attendent.
Ensemble, continuons à faire vivre ce pacte bicentenaire, fierté de notre passé et porteur d’espoir pour notre avenir.
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