Chronique d'Evariste : vu sur le site de Respublica.
Vous trouverez la chronique, et plus bas la pétition.
Dans la dernière chronique (Respublica 440), je vous faisais part d’initiatives en cours pour lancer une campagne liant le combat antiraciste au combat contre tous les intégrismes, dont l’intégrisme islamiste. Ce vendredi 28 avril a paru, dans Libération, un appel impulsé par Corinne Lepage, présidente de Cap 21 et ancienne ministre, Caroline Fourest, rédactrice en chef de Prochoix, essayiste et journaliste à Charlie Hebdo, et notre collaborateur Pierre Cassen.
Ce texte, intitulé «Contre un nouvel obscurantisme» est signé par des personnalités de premier plan, comme Yvette Roudy, Elisabeth Badinter, Dominique Sopo, président de SOS Racisme, Michèle Vianès, présidente de «Regards de Femmes», Annie Sugier, présidente de la «Ligue Internationale du droit des Femmes», Philippe Val, rédacteur en chef de Charlie Hebdo, Chahla Chafik, romancière d’origine iranienne, notre collaborateur Bernard Teper, par ailleurs président de l’Ufal, et d’autres militants qui, depuis des années, n’acceptent pas la loi du silence face à l’offensive de l’islam politique contre la République et la laïcité.
Le fait qu’il rassemble des initiateurs et signataires aux parcours différents, sur un thème commun, est de la plus haute importance. Ces militants affirment la nécessité de combattre en même temps le racisme et le communautarisme sous sa forme la plus visible, celle de l’obscurantisme incarné par l’islam politique, sans oublier pour autant l’intégrisme protestant, juif ou catholique.
Ce texte est important, car il lie trois combats essentiels: le combat social contre le désordre libéral, le combat antiraciste contre le discours de l’extrême droite, le combat républicain contre le discours diviseur des communautaristes et des intégristes.
Le Front national a été combattu avec le maximum d’efficacité parce qu’un cordon sanitaire a été dressé autour de lui, à droite (avec parfois des dérapages) comme à gauche, pour ne pas lui permettre de banaliser ses discours racistes et xénophobes.
Aujourd’hui, il convient d’avoir la même attitude avec l’extrême droite islamiste, et tous ceux qui la soutiennent.
Les initiateurs ont conscience, au lendemain de la sortie du livre de Villiers, «Les mosquées de Roissy», qu’il serait suicidaire pour les démocrates et les Républicains de laisser à une extrême droite catholique le monopole du combat contre une autre extrême droite, avec un discours multipliant les amalgames et encourageant le racisme.
La démarche de ce texte est exemplaire, et Respublica appelle tous ses lecteurs à signer la pétition. Il y a quelques mois, dans le même esprit, une initiative lancée par nos collaborateurs Marie Perret et Bernard Teper, publiée dans France Soir, et intitulée «Redonner son sens à la lutte contre tous les racisme», fut signée par Pierre-André Taguieff, Catherine Kintzler, Antoine Peillon et André Policar.
Il est aujourd’hui temps de clarifier des positions qui ne peuvent perdurer plus longtemps.
Il faut interpeller fortement les apprentis sorciers qui, à droite comme à gauche, par calcul électoraliste ou politicien, déroulent le tapis rouge aux islamistes.
Il faut demander des explications à Nicolas Sarkozy, qui veut assouplir la loi de 1905 et qui a fait de l’extrême droite islamiste, derrière l’UOIF, un interlocuteur officiel de la République en lui livrant le Conseil Français du Culte Musulman.
Il est temps de demander des comptes à tout l’UMP, qui a laissé deux des siens, Raoult et Roubaud, répondre favorablement à la demande de l’Union des Associations Musulmanes du 93 de faire voter une loi en France, pays des Lumières et de la séparation des Eglises et de l’Etat, contre la libre critique des religions.
Il est temps, à gauche, de se positionner face aux positions d’un Mouloud Aounit, qui, à la direction du Mrap, relaie sans vergogne l’offensive des islamistes de l’UOIF. Après avoir soutenu le voile à l’école, après avoir réclamé le droit à la viande hallal dans les établissements scolaires, ce militant, que le PCF a fait élire au conseil régional d’Ile-de-France sous l’étiquette d’Alternatives Citoyennes, a relayé la plainte de l’UOIF contre les journaux ayant publié les caricatures du prophète. Justement, des responsables du Mrap ont signé la pétition.
Il est temps d’interpeller les leaders Verts comme Alain Lipietz, Daniel Cohn-Bendit, Noël Mamère ou Gilles Lemaire qui cautionnent et encouragent l’entrisme des troupes de Tariq Ramadan dans leur organisation, l’exemple de Roubaix étant le plus aveuglant. Justement, des élus Verts ont signé la pétition.
Il est temps que des personnalités socialistes de premier plan, comme Martine Aubry ou Dominique Strauss-Kahn, s’expliquent sur les concessions qu’ils font dans leur commune à des intégrismes différents, mais semblables dans leur démarche de repli communautariste et religieux. Justement, la première signataire de cette pétition est socialiste.
Que dire de la LCR, ou nombre de militants ont signé l’ «Appel des Indigènes», mais où d’authentiques militants laïques résistent à la ligne antilaïque de Samary-Zafari.
Que dire d’Attac, où on retrouve les «Indigènes de la République» aux manettes pour tenter de liquider la direction laïque Nikonoff-Cassen ? Justement, des militants d’Attac ont signé cette pétition, même si ce n’est pas au nom d’Attac.
Il est temps, surtout, de sortir du silence calculateur et complice des principales formations politiques. Il est temps de ne pas laisser aux racistes et aux nostalgiques de la France chrétienne le monopole du combat contre l’extrême droite islamiste, et contre tous les intégrismes.
On doit mener de pair le combat antiraciste et le combat anti-intégriste. Ce n’est pas Respublica, où notre collaborateur Jocelyn Bézecourt publie un remarquable ouvrage sur «une autre lecture de la visite des Eglises à Paris», qui se laissera intimider par les cris des Tevanian, Geisser et autres, amalgamant systématiquement à du racisme la critique de l’islam politique.
Le vrai racisme, c’est d’accepter pour les populations d’origine arabo-musulmane une emprise intégriste que les bobos communautaristes n’accepteraient pas si elle les concernait directement.
Bien sûr, dans notre esprit, cet appel ne doit pas être une pétition de plus sur la toile, sans lendemain. La diversité des signatures, l’implantation militante des uns et des autres, la confiance qui unit les signataires, ne peut que favoriser la construction d’un large front contre tous les racismes, et tous les intégristes.
Ce qui a été réussi hier contre l’extrême droite, autour du Front national, doit être réussi, dans un contexte différent, contre l’extrême droite islamiste, nouveau totalitarisme liberticide du 21e siècle et tête de pont de l’offensive de tous les cléricalismes contre la séparation des Eglises et de l’Etat.
En respectant la diversité et l’opinion de l’ensemble des initiateurs, Respublica fera tout pour que se fédère, comme le suggérait Yvette Roudy lors d’une réunion récente au Cercle Républicain, à Paris, un front large sachant mener ensemble ce combat indispensable pour préserver les valeurs émancipatrices de la République laïque.
Bien sûr, Respublica est disponible pour animer, à la demande de cercles militants, tout débat sur ce thème.
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écrire à evariste@gaucherepublicaine.org
COMBATTRE LE RACISME ET TOUS LES INTEGRISMES
Un Cri contre le racisme et contre l'intégrisme
Publié le 28 Avril in Libération rubrique Rebonds
Une pétition pour redire haut et fort que nous voulons nous battre contre le racisme et contre l'intégrisme. Contre tous les racismes (antiarabe, antijuif, antifemme ou antihomosexuel) et tous les intégrismes.
par Caroline Fourest (essayiste et rédactrice en chef de la revue ProChoix), Corinne Lepage (ancienne ministre et présidente de CAP21) et Pierre Cassen (les Amis de Respublica).
Citoyens à la fois opposés au racisme et à l'intégrisme, nous poussons un cri. Depuis le 11 septembre 2001, le débat public semble avoir perdu tous ses repères. Tandis qu'une droite populiste et raciste surfe sur la peur de l'autre et de l'islam (en amalgamant Arabes avec musulmans, musulmans avec intégristes et intégristes avec terroristes), une certaine gauche a abdiqué tout esprit critique face à l'obscurantisme et traite d'«islamophobe» toute personne ayant l'audace de dire non à l'islam politique réactionnaire. Même lorsque cette résistance se fait au nom de l'attachement à la laïcité, à l'égalité hommes-femmes, par refus de l'incitation à la haine sexiste, homophobe ou antisémite. Il faut d'urgence sortir de ce double piège. Et redire, haut et fort, que nous voulons nous battre à la fois contre le racisme et contre l'intégrisme. Tous les racismes (antiarabe comme antijuif, comme antifemme ou antihomosexuel) et tous les intégrismes (de toutes les religions).
Pour éviter que le 11 septembre ne sonne le glas de la laïcité, il faut cesser de se taire face à l'offensive de l'islam intégriste. Elle gagne partout du terrain. En Palestine et en Egypte, les Frères musulmans (matrice de l'islam politique réactionnaire) viennent de remporter des succès électoraux comme jamais. Ailleurs, ils se placent en médiateurs, voire en tuteurs des communautés musulmanes sous prétexte de lutter contre le terrorisme. Comme en Angleterre ou en France. Après avoir invité l'UOIF à s'asseoir à la table de la République et du Conseil français du culte musulman, Nicolas Sarkozy ne propose-t-il pas de modifier la loi de 1905 ?
Dans le même temps, des députés UMP, comme Eric Raoult ou Jean-Marc Roubaux, ne proposent-ils pas de réactiver le délit de blasphème à la demande d'organisations musulmanes refusant le droit à l'irrévérence et à la caricature ? Si ces deux piliers, la loi de 1905 et la liberté d'expression, tombaient ou du moins s'effritaient, avec quelles armes pourrions-nous nous défendre face à cet obscurantisme qui a bien le visage de nouveau totalitarisme? Sur quoi pourrions-nous bâtir notre résistance face à la montée de tous les fanatismes?
Pour éviter un second 21 avril 2002, tout en menant ce combat contre l'intégrisme, il faut aussi reprendre la lutte contre le racisme et l'extrême droite. Dire et redire que le combat contre l'obscurantisme n'est pas un combat contre l'immigration ou contre les croyants. Mais un combat républicain et laïque devant unir tous les citoyens, quelle que soit leur origine, croyants, athées ou agnostiques. Même si les médias ne veulent pas l'entendre et préfèrent souvent donner la parole aux barbus ou aux filles voilées, ce combat est remarquablement porté aujourd'hui par des citoyens de culture ou de confession musulmanes (81 % sont attachés au principe de laïcité). En particulier, ceux d'origine algérienne ou iranienne (10 % des chauffeurs de taxis parisiens sont des Iraniens réfugiés en France). Ceux-là ont fui l'islamisme et connaissent, mieux que personne, le prix à payer lorsque la religion fait la loi. Les musulmans du monde entier, comme les habitants des quartiers populaires français, sont les premières victimes de l'intégrisme. Nous refusons de laisser ces êtres et ces quartiers être mis sous tutelle par des groupes religieux parce que l'Etat se désengage du social.
De même que nous refusons de laisser croire que les émeutes de novembre dernier ou les explosions de violence sont dues à l'«islamisation» de la France. Les islamistes n'en ont pas été les inspirateurs, même s'ils ont essayé d'apparaître auprès des pouvoirs publics comme des médiateurs pouvant se substituer aux autorités de la République. Sans succès. Pour l'instant...
Qu'en sera-t-il lorsque le lien social et interculturel ne sera plus qu'un champ de ruines, à cause des subventions qui n'arrivent pas aux associations citoyennes, ou qui arrivent trop aux associations confessionnelles ? La colère, la rage, la recherche du profit et de l'argent facile, sont bien à l'oeuvre dans les quartiers défavorisés. Si «islamisation» il y a, elle est due certes à la propagande des intégristes mais aussi au fait d'abandonner des citoyens et des quartiers entiers à l'exclusion, à l'inégalité et à la stigmatisation. En cela, les discours plein de haine et de raccourcis de Jean-Marie Le Pen ou de Philippe de Villiers, ou encore celui de Nicolas Sarkozy (qui dit dans son livre préférer l'espérance religieuse à l'espérance sociale), ne peuvent que contribuer à grossir les rangs des islamistes. Nous refusons de leur laisser le combat pour l'égalité, les libertés et la laïcité. Les signataires de ce cri demandent donc à chaque formation qui postule aux prochains suffrages de s'engager clairement à combattre sans concession à la fois l'intégrisme que représente l'islam politique liberticide et le racisme.
Parmi les premiers signataires de la pétition (1):
Yvette Roudy (ancienne ministre), Philippe Val (directeur de publication de Charlie Hebdo), Elisabeth Badinter (philosophe), Fiammetta Venner (politologue et essayiste), Chahla Chaffiq (sociologue et écrivaine), Juliette Minces (anthropologue), Bernard Teper (président de l'Union des familles laïques), Loubna Méliane (cofondatrice de Ni putes ni soumises), Ingrid Renaudin (cofondatrice de Ni putes ni soumises), Dominique Sopo (président de SOS Racisme), Samia Labidi (association d'Ailleurs ou d'ici mais ensemble), Ziad Goudjil (Histoires de mémoire), Annie Sugier (présidente de la Ligue du droit international des femmes), Linda Weil-Curiel (Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles), Fatima Lalem (sociologue et militante au MFPF), Françoise Keyser (Femmes contre les intégrismes), Philippe Foussier (président du Comité Laïcité République), Patrick Kessel (président d'honneur du Comité Laïcité République), Philippe Namias (président de Laïcité écologie association), Bernard Frédérick (rédacteur en chef de la revue FondationS), Lola Devolder (membre du comité éditorial de ProChoix), Taos Aït Si Slimane (médiatrice scientifique à la Cité des sciences), Michèle Vianès (responsable d'associations, féministe et laïque), Nasser Ramdane (responsable à SOS Racisme), Alain Callès (ancien président du Mrap), Emmanuelle Le Chevallier (membre du conseil d'administration du Mrap), Nadia Kurys (membre du bureau exécutif national et de la présidence nationale du Mrap), Arlette Zilberg (adjointe au maire du 20e arrondissement de Paris, élue Verte), Hélène Zanier (conseillère municipale Les Verts), Arezki Metref (journaliste et écrivain), Terna Hajji (citoyenne française), Françoise Seligmann (présidente d'honneur de la LDH), René Pétillon (dessinateur), Antoine Sfeir (directeur des Cahiers de l'Orient)...
(1) www.petitiononline.com/2104/petition.html
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