
Digressions personnelles à partir du Grenelle de l’Environnement.
Quelques petites digressions personnelles après ce qu’il a été convenu d’appeler le « Grenelle de
l’Environnement ».
Un grand moment de consensualisme bien pensant d’un côté et de surenchère idéologique de l’autre.

Bref le gouvernement a fait trop ou pas assez…. Comme toujours.
C’est bien, l’écologie est au devant de la scène, on va interdire les OGM, on s’occupe des gaz à effet de serre, on s’attaque à
la mal bouffe, on prépare le monde de demain.
Bien sûr ce n’est pas assez puisqu’on n’a pas résolu le problème du nucléaire, que la chasse est toujours là et les Mc Do
aussi….
Pour tout dire quelque chose me dérange dans cette philosophie de la bienpensance.
Tout d’abord l’air béa d’un certain nombre de nos élites médiatiques qui se découvrent un cheval de bataille à peu de frais.
Fini les combats en isme, maintenant on s’occupe des choses sérieuses, on va préserver notre planète.
Eh oui, il ne s’agit plus de changer le monde (tâche bien trop ingrate)… Il s’agit de le conserver tel qu’il est… ad vitam
aeternam….
Pour moi cette philosophie de la vie est un profond conservatisme allié à une vision de l’homme idéal, parfait, nouveau,
aseptisé, qui me paraît particulièrement dangereuse.
Leur peur de la mort, de leur propre mort comme de l’extinction de l’espèce humaine et la disparition de notre planète – toutes
choses qui arriveront pourtant en leur temps – les empêche de vivre ici et maintenant et pire….. nous empêche de vivre.
Le nouvel ordre mondial de la moralisation et de la contrainte est déjà en marche. Avec comme alibi, les meilleures intentions
du monde (sauver la planète, sauver les hommes – y compris contre eux-mêmes- sauver les animaux …), mais comme nous le savons depuis toujours, l’Enfer est pavé de bonnes
intentions.
Le monde que ces gens là nous préparent est tout bonnement un monde cauchemardesque.
Ah qu’il est loin le temps où il était «interdit d’interdire» !!
Des forces nombreuses convergent pour remettre en cause notre façon de vivre à la française. Oui en France on aime la bonne
chère, le bon vin et les jolies femmes. Les femmes sont libres et indépendantes et maîtresses de leurs corps comme de leur destinée. Ca a été le fruit d’un long combat contre les forces
réactionnaires et c’est un acquis qu’une majorité d’hommes se lèveront pour défendre.
Les français ont souvent l’humour un peu vert. Ils aiment les gauloiseries et c’est bien normal pour des descendants
(même imaginaires) de gaulois!! Comme le disait François Mitterrand qu’on interrogeait un jour sur sa vie privée et son affection particulière pour la gent féminine : « Le peuple
aime à savoir que le roi est puissant ». Phrase inimaginable dans la bouche d’un chef d’état autre que français! Et parfaitement admise chez nous puisque les frasques conjugales des
chefs de l’état sont monnaie courante, d’aussi loin qu’on puisse se rappeler, de Charlemagne … à Nicolas Sarkozy en passant par Henri IV, Louis XIV, Napoléon, Mitterrand ou Chirac pour n’en citer
que quelques uns !
Les français sont volontiers frondeurs et souvent rétifs à l’autorité : « Quand il s’agit de rosser les cognes,
tout le monde se réconcilie » chantait Brassens.
Et méfiants à l’égard des mots d’ordre globalisants.
En très grande majorité profondément laïcs, les français ne sont pourtant pas franchement hostile à la religion pourvu qu’elle
ne soit «pas trop regardante sur nos histoires de fesses» comme le chante Kent dans Les Vrais Gens. Ils savent qu’ils sont heureusement sortis du cléricalisme et de la main mise
de l’Eglise catholique sur leurs vies.
Quelle belle devise que celle de Liberté, Egalité, Fraternité, gravée aux frontons de nos bâtiments et dans notre
constitution comme un idéal toujours à construire.
Alors quelles sont ces forces déstabilisatrices ?
Tout d’abord une logique économique toujours plus inégalitaire où l’argent va toujours plus aux riches. Mondialisée ou pas,
cette logique est contraire à l’esprit français. Oui les français sont entreprenants, innovants, inventifs. Mais ils sont pour que le travail paie vraiment et contre la société de rentiers et de
boursicoteurs qu’on leur promet.
Ensuite une société bloquée ou l’ascenseur social comme on dit, fonctionne de moins en moins bien. Les français ont
fait leur depuis longtemps cette belle phrase du Talmud «Ce n’est pas la richesse qui est scandale, c’est la pauvreté». Les français ne pourront admettre longtemps que leurs enfants
aient comme seule perspective de vivre moins bien qu’eux.
La promesse d’une société où le travail à l’école et le mérite sont récompensés s’éloigne. Il est urgent d’inverser la
vapeur.
Enfin la montée des communautarismes. C’est un danger que la France n’a longtemps pas connu. En France, il y a depuis 1789 (et
même du temps de la royauté depuis François 1er) un primat du collectif sur l’individuel et depuis 1905 une séparation entre la sphère publique et la sphère privée. C’est notre
carte génétique (comme on dirait aujourd’hui).
Que des français revendiquent un certain particularisme oui, pourquoi pas, mais dans la sphère privée.
C’est notre Contrat Social, jamais accepté vraiment par les fondamentalistes de tout poil, mais imposé par notre loi commune.
Contrat accepté de bon cœur en 1905 par les républicains et les communautés protestantes et israélites, rejetée puis accepté du bout des lèvres par l’Eglise catholique.
D’ailleurs nous voyons bien depuis plusieurs années un nouveau raidissement des autorités catholiques et surtout des papes
Jean-Paul II et Benoît XVI dans une direction toujours plus traditionaliste.
Pourquoi nier que ce contrat soit également combattu par une frange radicale d’un islam intransigeant et fondamentaliste qui
progresse également dans de nombreux pays musulmans?
Plus de 6 millions de musulmans vivent aujourd’hui en France soit plus de 8% de la population. L’immense majorité d’entre eux
est très heureux d’être français et de bénéficier de ce Contrat.
Pourtant une minorité activiste et prosélyte essaie de faire prévaloir la loi musulmane sur la loi de la République. Et il faut
clairement dire que ce n’est pas acceptable. Ce que nous le tolérons pas du catholicisme, nous ne le tolérerons pas de l’islam non plus.
Il faut leur dire clairement qu’en France la question religieuse est seconde et relève de la sphère privée. Qu’en France on
n’exerce pas de contrainte sociale pour respecter les préceptes de la religion. Qu’en France les femmes sont libres et n’ont pas à subir la tutelle paternelle ou fraternelle. Que si des musulmans
veulent respecter certains préceptes (Ramadan, prière, manger hallal…) ils n’ont pas à l’imposer au sein de leur propre communauté et encore moins à l’extérieur. Qu’en France, notre humour
national permet de se moquer des religions, de toutes les religions, de leurs représentants comme de leurs prophètes. Qu’en France on ne pratique pas de mutilation sexuelle sur les jeunes
filles.
Et que ceux qui transgressent ces principes seront frappés par notre loi commune.
Il faut être strict là-dessus pour permettre aux millions de français d’origine musulmane qui souhaitent se libérer de ces
pesanteurs religieuses de pouvoir le faire en toute liberté. Leur priorité est fort heureusement, comme tout un chacun, de vivre heureux la meilleure vie possible.
De mon point de vue, c’est à partir de ce socle de réflexions prioritaires que nous pourrons ensuite avancer vers un avenir
meilleur.
A l’heures où en France 7 millions de personnes vivent en France avec moins de 800€ par mois, où des millions de nos concitoyens
sont mal logés, où des centaines de millions de femmes et d’hommes dans le monde crient famine, où des millions d’enfants sont exploités, où la guerre fait des ravages quotidiens, où les
extrémismes et les fanatismes refont surfaces… les préoccupations – certes louables – de nos dirigeants est de savoir si l’on va rouler à 110 kms heures sur les autoroutes au lieu de
130…
Moi je veux bien. Je dis simplement que les questions posées et l’énergie déployée ne sont pas en phase avec les réalités du
monde actuel ni avec les problèmes urgents que nous avons à résoudre. Que c’est un bel écran de fumée pour éviter de se poser les vraies questions.
Quid de la répartition des richesses mondiales ? Quid de la lutte contre la pauvreté, l’exploitation, l’ignorance ?
Quid des déplacements de populations dus à la misère ? Quid de la corruption endémique des régimes orientaux, moyen-orientaux et africains ? Quid de la démocratie ? Quid de la
laïcité et du vivre ensemble ?
Un exemple qui m’a toujours fait sourire, pour ne pas dire pleurer : celui de la mal bouffe. Les pauvres aujourd’hui
auraient une tendance manifeste à l’obésité. C’est certainement vrai. Jusqu’au 20ème siècle, le problème était plutôt qu’ils crevaient de faim. Salauds de pauvres, ils ne sont
jamais là où l’on voudrait qu’ils soient.
Maintenant que leurs femmes ressemblent aux madones de Courbet, Manet et autres Manet on voudrait qu’elles soient
neurasthéniques comme leurs arrières grands-mères.
Les pauvres ne pourraient-ils donc pas faire un peu attention et arrêter de se gaver de pâtes sauce bolognaise éco-plus de chez
Leclerc ? C’est vrai qu’ils ont déjà tant de distractions dans la vie !! Les vacances : Non. La culture : Non. Les divertissements : Non (sauf TF1). Les nouvelles
technologies : Non (ils n’ont même pas pu répondre en ligne au questionnaire sur le site du ministère de l’Environnement…). L’alcool : Non, c’est mal. Le Tabac : Non c’est
dangereux. Il ne leur reste que la bouffe (même mauvaise) et la baise, mais là encore le retour à l’ordre moral va bien trouver de nouvelles contraintes.
Le pire est qu’en France ces questions n’auraient même pas besoin de se poser. Avec quelques centaines de millions d’euros de
subvention (à peine plus que les 600 millions d’€ de la caisse noire du Medef) nous aurions les moyen de nourrir à bas prix avec des produits de qualité, fait par des agriculteurs responsables,
tous ces pauvres victimes de la mal bouffe.
Surtout qu’à l’échelle mondiale le problème est bien plutôt d’arriver à simplement nourrir les hommes pour qu’ils ne meurent pas
de faim. On est loin là de la mal bouffe…. On en est juste au problème de la bouffe qui n’est pas résolu.
J’ai l’impression que même avec nos pauvres on se pose des questions de riches.
Autre débat qui me fait halluciner, celui qui touche à la colonisation et à ses répercutions actuelles. Là encore il me semble
que cela évite bien à propos de se poser les vraies questions.
La colonisation c’était mal. C’est un fait. Nous avons décolonisé, parfois dans la douleur, et c’est un bien. Rappelons au
passage – sans forcément être taxé de racisme – que dans l’esprit des pères français de la colonisation, je pense notamment à Jules Ferry, il s’agissait avant tout d’apporter la civilisation, la
science, l’instruction à des peuples qui n’en disposaient pas.
Ferry s’est d’ailleurs fait violemment attaquer, et a du laisser le gouvernement, à cause de sa politique coloniale puisqu’il
lui était reproché de dilapider l’argent de la France et de ne pas se concentrer sur la revanche contre l’Allemagne.
C’est après que les choses ont mal tournées et que l’exploitation des peuples colonisés s’est révélée inacceptable. L’idée était
bonne… mais les conséquences ont été désastreuses. Pourtant nous savions depuis la Révolution et Bonaparte, qu’on ne fait pas le bonheur des peuples malgré eux et surtout les armes à la
main.
A titre personnel ça ne me dérangerait pas que la France fasse des gestes symboliques forts envers les peuples qu’elle a
anciennement colonisé.
Pour autant il me semble que cette question occulte gravement une autre, bien plus actuelle, qui est celle de la responsabilité
des dirigeants des pays anciennement colonisés à l’égard de leurs propres peuples.
Je veux bien que Bouteflika demande à la France de se repentir pour la période coloniale. Mais l’Algérie est indépendante depuis
1962. Cela fait maintenant plus de 45 ans.
Quelle est la responsabilité de la France dans l’état de délabrement de la société algérienne actuelle et quelle est la
responsabilité de ses propres dirigeants depuis 1962 ? L’Algérie est une puissance pétrolière et gazière très importante. Elle dispose grâce à cette manne de milliards d’euros de revenus
annuels. Où sont les infrastructures ? Où sont les Universités, les pôles de recherches, les hôpitaux high tech, les entreprises performantes ? Les algériens devraient vivre dans
l’opulence d’une société moderne et développée. Beaucoup trop d’entre eux vivent dans la misère et cherchent encore à venir dans ce qu’ils considèrent comme l’Eldorado français.
Pourquoi ? Où est passé l’argent du développement de l’Algérie ? Quels ont été les freins, politiques, économiques et
culturels à ce développement ? Voici des questions majeures et actuelles que Bouteflika ne pose pas. Parce qu’il ne s’agit pas là de dénoncer le colonisateur comme bouc émissaire, mais de
faire acte de repentance auprès de son propre peuple.
Au lieu de regarder la paille dans l’œil de ton voisin, prends plutôt garde à la poutre qui est dans le tien.
On pourrait bien entendu multiplier les exemples, en Afrique et au Moyen-Orient notamment.
Ces exemples ont été pris simplement pour essayer d’analyser les manœuvres de diversions de certains dirigeants ou groupes de
pression pour proposer des réponses à des questions accessoires en évitant de parler des sujets qui fâchent.
Rien n’est noir ou blanc et la morale comme la bonne conscience ne servent en l’occurrence à rien, sauf à brouiller les cartes
et à éviter les débats essentiels sur la complexité du monde.
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