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Le Blog des Spiritualités

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Benoît XVI, l'église catholique et la Franc-Maçonnerie.

Publié par Théodore Vézelay sur 5 Janvier 2023, 18:19pm

Catégories : #BenoitXVI, #CardinalRadzinger, #EgliseCatholique, #FrancMaçonnerie

Aujourd'hui ont lieu les obsèques du Pape émérite Benoît XVI.

Joseph Ratzinger le 16 avril 1927 en Bavière, il est mort le 31 décembre 2022. Succédant à Jean-Paul II, il avait été Pape sous le nom de Benoît XVI de 2005 jusqu'à sa renonciation en 2013.

Théologien de haut vol selon ses pairs, il fut nommé archevêque puis Cardinal par le Pape Paul VI en 1977.

Le Pape Jean-Paul II - de qui il fut très proche - le nomme Préfet de la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi (Congregatio pro Doctrina Fidei,)   institution qu'il présidera de 1981 à 2005 et qui sera durablement marquée par la forte personnalité du Cardinal Ratzinger.

Ce Dicastère pour la doctrine de la Foi a remplacé en 1965 la Congrégation Sacrée de l'Inquisition romaine et universelle, également appelée Congrégation du Saint-Office ou Saint-Office, créée en 1542 pour lutter contre le Protestantisme, abolie un temps par Bonaparte et qui est restée de funeste mémoire pour tous les penseurs libres.

« La tâche propre de la Congrégation pour la doctrine de la foi est de promouvoir et de protéger la doctrine et les mœurs conformes à la foi dans tout le monde catholique : tout ce qui, de quelque manière, concerne ce domaine relève donc de sa compétence » selon son texte fondateur.

Cardinal conservateur il fut un Pape également conservateur qui donnât des gages notamment aux fidèles de la messe selon le rite de Saint Pie V.

Pourtant c'est son action comme Préfet de la Sacré Congrégation pour la Doctrine de la Foi qui nous intéresse plus particulièrement ici. En effet la déclaration du 26 novembre 1983 signée par le Cardinal Ratzinger et approuvée par le Pape Jean-Paul II est la dernière déclaration officielle de l'Eglise Catholique concernant la Franc-Maçonnerie.

La première étant la bulle In Eminenti du pape Clément XII dès 1738, mais on pourrait également citer Providas de Benoît XIV en 1751, Quo Graviora de Léon XII en 1826 ou Humanum Genus de Léon XIII en 1884...  Toutes sont constantes sur leur opposition à la Franc-Maçonnerie.

La position de l'église catholique apostolique et romaine n'eut aucune conséquence sur la Maçonnerie anglo-saxonne (Angleterre, Etats-Unis, Europe du Nord...) qui grandit en terres protestantes (quels que soient les courants du Protestantisme).

Elle eu par contre de l'impact en terres catholiques puis plus ou moins laïcisées (France, Belgique, Italie, Espagne, Bavière...) puisque l'église catholique interdit l'appartenance de ses fidèles à la Franc-Maçonnerie et voire même elle les a excommunié pendant un temps.

Certes il y eu en France la période de lutte pour la République et l'antagonisme entre les républicains d'un côté (souvent soutenus par les loges maçonniques)  et les monarchistes et impériaux de l'autre, soutenus par les cléricaux.

Des frères - notamment de la Grande Loge de France - à l'image d'Albert Lantoine avec sa "Lettre au Souverain Pontife" en 1937, ont tenté de renouer les liens entre francs-maçons de Tradition et église catholique. Sans grand succès il faut le dire. 

Après la Guerre les initiatives vont se multiplier.

Antonio Coen, Grand Maître de la Grande Loge de France lance à son tour à la radio en 1956, très peu de temps avant sa mort, un appel à toutes les forces spirituelles.

Pierre Simon , Grand Maître de la Grande Loge de France,  reçoit dans le Grand Temple de la Grande Loge de France, avec tous les honneurs maçonniques, Monseigneur Daniel Pézeril, évêque auxiliaire de l'archevêque de Paris, le 22 juin 1971, qui donne une conférence ayant pour thème « Les signes de l'église catholique de demain ».

Jean-Louis Mandinaud, Grand Maître de la Grande Loge de France reçoit le 22 mars 1994 le Père Bernard Marliangeas (O.P.), au temple Franklin Roosevelt de la Grande Loge de France, pour une conférence de presse commune à propos du lancement du film « Jardin caché », co-produit par la Grande Loge de France, Chrétiens-Médias-Yvelines et le Centre Français de Radio-Télévision où l’on parlait – à l’aide d’exemples – de catholiques francs-maçons.

Monseigneur Jean-Charles Thomas, qui a aujourd’hui 93 ans, qui fut évêque de Versailles de 1988 à 2001 a toujours eu des relations suivies avec nombre de frères de la Grande Loge de France.

Nous voyons bien qu'il y a des tentatives de rapprochement entre certains prélats et certaines églises nationales et locales et certains frères et certaines obédiences maçonniques.

Et particulièrement des obédiences de tradition et spiritualistes comme la Grande Loge de France ou la Grande Loge Nationale Française (par exemple) qui ne prennent pas de position contre l'Eglise Catholique.

Le canon 23-35 (abolit lors du Concile de Vatican II) parlait "d'associations hostiles à l'Eglise" dont les membres étaient excommuniés, ce que ne sont assurément pas des obédiences comme la Grande Loge de France.

C'est à ces rapprochements que la Sacrée Congrégation pour la Doctrine de la Foi a voulu mettre un terme. Voici le texte et nous verrons ce que cela implique du point de vue de la hiérarchie de l'Eglise Catholique :

 

La Sacrée Congrégation pour la doctrine de la foi s'est prononcée sur la Franc-Maçonnerie de façon récente lors de sa déclaration du 26 novembre 1983

"DÉCLARATION SUR L’INCOMPATIBILITÉ
ENTRE L’APPARTENANCE À L’ÉGLISE ET LA FRANC-MAÇONNERIE"

On a demandé si le jugement de l’Eglise sur les associations maçonniques était changé, étant donné que dans le nouveau Code de droit canonique il n’en est pas fait mention expresse, comme dans le Code antérieur.

Cette Congrégation est en mesure de répondre qu’une telle circonstance est due au critère adopté dans la rédaction, qui a été suivi aussi pour d’autres associations également passées sous silence parce qu’elles sont inclues dans des catégories plus larges.

Le jugement négatif de l’Eglise sur les associations maçonniques demeure donc inchangé, parce que leurs principes ont toujours été considérés comme inconciliables avec la doctrine de l’Eglise, et l’inscription à ces associations reste interdite par l’Eglise.

Les fidèles qui appartiennent aux associations maçonniques sont en état de péché grave et ne peuvent accéder à la sainte communion. Les autorités ecclésiastiques locales n’ont pas compétence pour se prononcer sur la nature des associations maçonniques par un jugement qui impliquerait une dérogation à ce qui a été affirmé ci dessus, dans la ligne de la déclaration de cette Congrégation du 17 février 1981 (cf. AAS 73, 1981, p. 240-241: DC 1981, n° 1805, p. 349.

Voir aussi la déclaration de l’épiscopat allemand du 12 mai 1980, DC 1981, n° 1807, p. 444-448).

Le Souverain Pontife Jean-Paul II, dans l’audience accordée au cardinal préfet soussigné, a approuvé cette déclaration, qui avait été délibérée en réunion ordinaire de la Congrégation, et en a ordonné la publication.

A Rome, au siège de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, le 26 novembre 1983.

Joseph, card. RATZINGER, Préfet + Fr.

Jérôme Hamer, O.P.Secrétaire "

 

Quelques conséquences de ce texte :

- L'opinion négative qu'a l'Eglise sur la Franc-Maçonnerie depuis 1738 est confirmée et maintenue.

- L'adhésion d'un catholique à une obédience maçonnique est interdite par l'Eglise.

- Si un catholique devient tout de même franc-maçon malgré l'interdit, il est en état de péché grave et ne peut plus communier lors de la Messe. (N'est-il donc pas , de fait, excommunié?).

- Ce n'est pas aux églises locales de tenter de faire le tri entre "bonnes obédiences maçonniques" et "mauvaises obédiences maçonniques". L'Eglise les condamne toutes et est seule habilité à formuler un jugement.

- il n'y a aucune dérogation possible à ce jugement négatif de l'Eglise et à ce qu'il implique.

 

Du point de vue des maçons de tradition

A ma connaissance aucune interdiction n'a jamais été faite contre un catholique qui voudrait être membre d'une loge.

Les catholiques sont évidemment les bienvenus dans les loges maçonniques où travaillent des maçons de tradition à vocation initiatique et spiritualiste (comme par exemple les loges de la Grande Loge de France).

Par exemple le frère Hubert Germain (1920-2021), qui a été le dernier Compagnon de la Libération vivant, a toujours proclamé qu'il était entré à la Grande Loge de France car sa foi catholique y était respectée et qu'il pouvait vivre sans problème ses deux engagements. Il sera le créateur de la loge Pierre Brossolette - Compagnon de la Libération.

Idem pour le frère et Colonel  Arnaud Beltrame (1973-2018) qui a toujours pu concilier sa foi catholique et son engagement maçonnique au sein de la loge Jérôme Bonaparte de la Grande Loge de France.

Du point de vue de la Franc-Maçonnerie il n'y a donc aucun souci pour qu'un frère soit catholique. Pas plus que pour un protestant, un juif, un orthodoxe, un bouddhiste, un musulman, un agnostique, voire un athée. Il leur est simplement demandé - comme à tous - de ne pas faire de prosélytisme en loge. Mais là encore, ça vaut pour tout le monde : pas de prosélytisme politique ou religieux, même si des discussions suivis de débats sont autorisés sur ces sujets.

Conclusion (provisoire)

Le Pape François reviendra il sur la position exprimée par le Cardinal Radzinger (et donc Benoît XVI), et approuvée par le Pape Jean-Paul II en 1983 ? Peut être. Mais pour l'instant aucun signal n'est venu annoncer un changement de doctrine de l'Eglise concernant le jugement hostile qu'elle exprime depuis toujours à l'égard de la Franc-Maçonnerie.

Nous en serions heureux mais cela ne change rien non plus : les frères catholiques sont et seront toujours les bienvenus dans nos loges de Saint-Jean.

Théodore Vézelay

 

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