La Gazette de la Côte d'Or propose une interview d'Alain Graesel, Grand Maître de la Grande Loge de France. Je vous en propose la lecture :
Alain Graesel, Grand Maître de la Grande Loge de France : Le secret générera toujours des fantasmes.
La Franc-maçonnerie, société secrète déployant ses tentacules pour s’infiltrer dans les hautes sphères de l’Etat. Leur but : le pouvoir. Bigre ! Loin des idées préconçues flattant l’imaginaire collectif Alain Graesel, Grand Maître de la Grande Loge de France, démonte point par point cette théorie du complot à mille lieux de la réalité.
La Gazette : Pourquoi avez-vous accepté l’interview ?
Alain Graesel, Grand Maître de la Grande Loge de France : Mais je fais des interviews pratiquement à chacun de mes déplacements quand je viens faire des conférences publiques. Les organisateurs préviennent les médias. Quand on me demande une interview, je l’accorde bien évidemment. Ce me semble naturel d’être en relation avec notre environnement médiatique, c’est aussi simple que cela.
Pourtant, traditionnellement, ce n’était pas la politique des Francs-Maçons…
La semaine dernière nous avons fait une réunion à la Mutualité où nous étions 2 000 personnes. En réalité, nous sommes assez visibles.
Pourquoi les Francs-Maçons s’ouvrent au public ?
J’ai le sentiment que cette espèce de fantasme perdurant encore un peu a probablement tendance aujourd’hui à se diluer légèrement. En réalité, nous n’avons rien à cacher. Effectivement, nous faisons des tenues où ne sont invités que des Francs-maçons, mais cela ressemble à des réunions d’association. Par exemple, je fais parti d’une association d’anciens élèves. Nous nous réunissons une fois par an, et ne sont invités que les membres et à jour de leur cotisation. Le secret maçonnique est éventé.
Mais avec cette attitude vous embêtez la presse. Puisque à force vous allez tuer le sujet récurrent et annuel…
Je vous présente mes excuses. (Rire) Mais c’est vrai que c’est un marronnier pour le compte. J’ai discuté avec plusieurs journalistes. Ils m’ont effectivement expliqué que la couverture Francs-Maçons figure parmi les meilleures ventes !
En même temps cela veut-il dire que le fantasme Francs-maçons existe encore ?
Oui, mais est-ce qu’il n’existe pas une manière de l’entretenir ? J’ai évoqué le sujet avec quelques responsables politiques ou par exemple Eric de Montgolfier qui est venu plancher à plusieurs reprises à la Grande loge de France à Paris. S’il le fait, c’est qu’il doit être à l’aise avec notre obédience car il a probablement moyens de prendre des infos lui permettant de savoir s’il est sur un terrain miné ou non. La conversation avec lui était la suivant, sans que j’aie à interpréter ses propos : « il n’y a rien à reprocher particulièrement à la Maçonnerie. Mais le secret générera toujours des fantasmes. » Par conséquent, n’avons-nous pas intérêt d’entretenir cette idée de secret pour générer du fantasme pour permettre de planter des marronniers ? Je suis irréprochable sur ma vie personnelle comme professionnel. Et pourtant je suis Maçon. Cela fait-il de moi un coupable en puissance, et de quoi ? Des Maçons comme moi il en existe près de 150 000 en France toutes obédiences confondues. La Maçonnerie est une association loi 1901. Nous sommes passionnés de valeurs provenant de cette démarche intéressante et riche.
Ce qui alimente le fantasme c’est aussi le rang social des Frères composants les loges. Acceptez-vous d’autres personnes n’étant pas industrielles, politiques, ou économiques ?
La sociologie de la Grande Loge de France est composée de toutes les catégories sociaux-professionnelles. Dans ma loge de Nancy, on trouve des gens comme moi en profession libérale. Il y a également des enseignants du primaire au supérieur, mais aussi des médecins, des architectes, des géomètres, des artisans, des commerçants, des cadres du public comme du privé. Bien sûr on trouve des patrons d’entreprises. Mais il n’y a pas que cela. Une de nos règles de base est de faire en sorte qu’une loge, composée en général de 40 à 50 membres, ne compte que deux ou trois personnes d’une même catégorie professionnelle. Nous ne voulons pas de structures corporatistes.
Ma réponse est catégorique : non.
Un livre vient de sortir : Un Etat dans l’Etat. Sur cette couverture on voit sur une photo de palais de l’Elysée coupée par une bande rouge avec inscrit dessus : « le contre pouvoir maçonnique ». Les Francs-Maçons ont-ils autant d’influence sur la politique que comme par le passé ?
Sur la peine de mort, ou l’IVG il y a eu une forte implication maçonnique car ce sont des valeurs qui nous sont chers. Maintenant la question est la suivante : la maçonnerie est-elle un Etat dans l’Etat ? Ma réponse est catégorique : non. D’ailleurs les Maçons étant proche du président Sarkozy sont identifiés. Mais si c’était un Etat dans l’Etat, les Maçons agiraient discrètement. S’ils sont compétents dans un domaine, pourquoi le président Sarkozy devrait se passer de leur service au titre de leur appartenance à la Franc-maçonnerie ?
En même temps, le pouvoir appartient-il encore aux politiques ?
C’est une analyse qui est hors du jeu maçonnique. Mon avis est professionnel. Nous avons mis en place notre société depuis une vingtaine ou trentaine d’année, notamment depuis la chute du mur. L’économique a probablement pris le pas sur le politique comme déterminent. Avec la chute du mur, est tombée l’opposition idéologique entre l’Est et l’Ouest.
Quels sont les thèmes que vous abordez pendant vos tenues ?
Je vais citer trois thèmes car il me semble être au cœur des questions de l’évolution de notre société et de notre culture. Le premier : le dialogue entre les cultures, les spiritualités, et les familles de pensées. Personnellement, je ne suis pas croyant d’une religion particulière. Certains nous parlent du choc des civilisations. Nous nous sommes attachés au dialogue entre les cultures, car si on ne favorise pas cette idée on aide, sans le vouloir, les communautarismes. Cette situation est un danger pour la culture et la république. Autre thème : les valeurs sont-elles universelle ou universalisables ? Lorsque que l’on fait le constat que les cultures sont différentes. Elles véhiculent des valeurs distinctes. Il n’en reste pas moins qu’il faut penser ses valeurs sur un fond humain. Le troisième thème : technos-sciences, éthique et complexité. Le progrès aujourd’hui va tellement vite que nous sommes obligé derrière de coller une réflexion éthique car sinon on dérape par rapport à la science. Ces thèmes font débats dans nos loges. C’est pourquoi il nous semblait important de le manifester devant le grand public .
Propos recueillis par par Jérémie Demay - 19/03/2009
° L'article de la Gazette de la Côte d'Or.
° Le site de la Grande Loge de France.
Attention ! Cet article, comme tous les articles du "Bloc-Notes de Jean-Laurent sur les Spiritualités", (http://www.jlturbet.net/) est écrit en mon nom personnel.
Je ne parle ni au nom d'une association, ni d'un parti, ni d'une loge, ni d'une obédience maçonnique.
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Je ne suis en aucune façon habilité à écrire au nom d'une association, d'un parti, d'une loge, d'une obédience maçonnique. Tout ceci pour que cela soit bien clair, qu'il n'y ait aucune ambiguïté de quelque nature que ce soit.
Quelles que soient mes responsabilités - ou non - présentes ou futures dans une organisation, les propos tenus dans cet article comme dans tous les articles de ce Bloc-Notes, sont exclusivement des opinions personnelles qui n'engagent que moi.
Je rappelle simplement que la liberté d’expression est en France un droit Constitutionnel, quelle que soit notre appartenance à une association de quelque nature que ce soit.
Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »
Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.
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Jean-Laurent Turbet
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