"Quand j'ai dû quitter l'Allemagne en 1939, je pensais qu'il n'y aurait plus jamais ici de vie juive." Le maître de la cérémonie, le rabbin Walter Jacob, âgé de 76 ans, qui s'exprimait devant un millier de personnes rassemblées dans la nouvelle synagogue de Dresde, n'a pas caché son émotion, jeudi 14 septembre. Pour la première fois depuis la destruction par les nazis de l'Ecole supérieure du judaïsme, en 1942, un Allemand, un Tchèque et un Sud-Africain ont reçu l'ordination rabbinique en Allemagne après y avoir été formés.
Mais, a ajouté le rabbin Jacob dans un sourire "aujourd'hui l'Allemagne se réjouit avec nous, et toute l'Europe aussi". Puis il a pris dans ses bras les trois nouveaux rabbins, formés dans le collège progressiste Abraham-Geiger de Potsdam : l'Allemand Daniel Alter, qui a laissé couler ses larmes, le Tchèque Tomas Kucera, et le Sud-Africain Malcolm Mattitiani.
CENT CINQ MILLE MEMBRES
Il y avait jusqu'à présent des rabbins qui officiaient en Allemagne, mais c'est la première fois depuis la Shoah que plusieurs d'entre eux reçoivent l'ordination après avoir suivi une formation en Allemagne. Alter rejoindra sa communauté d'Oldenbourg, dans le Nord-Ouest, Kucera celle de Munich, et Mattitiani celle du Cap, en Afrique du Sud. "C'est un moment très particulier pour moi, très émotionnel", a déclaré Daniel Alter. "Mais ça l'aurait été tout autant si je n'étais pas le premier rabbin allemand nommé en Allemagne" depuis la guerre, a-t-il affirmé.
L'Allemagne compte plus de cent communautés juives fortes de quelque cent cinq mille membres, contre près de six cent mille avant la guerre. Elles se sont développées dans de nombreuses villes, notamment Francfort et Munich, une majorité des fidèles venant de pays de l'ancien bloc communiste. Depuis 1945, "au fil du temps, la croissance et l'intégration de la communauté ont été telles qu'il n'était plus compréhensible ou responsable que des rabbins ne soient pas formés aussi en Allemagne", a souligné le vice-président de la Conférence allemande des rabbins, Henry Brandt.
"Nous ne sommes pas encore dans la normalité", a toutefois expliqué Heinz-Joachim Aris, président de la communauté juive de Saxe, en montrant les dispositifs de sécurité importants déployés autour de la synagogue.
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LEMONDE.FR avec AFP | 15.09.06 | 10h00 • Mis à jour le 15.09.06 | 12h52
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