Le président algérien Abdelaziz Bouteflika a réitéré ses accusations de génocide durant la colonisation française de l'Algérie et réclamé des "excuses publiques et solennelles" de la France en préalable à la signature d'un traité d'amitié entre les deux pays.
Le mois dernier, les autorités françaises avaient réagi avec consternation à des propos similaires tenus à Constantine par le chef de l'Etat algérien sur le "génocide de l'identité algérienne".
Il est clair pour tous, quelques soient les condamnations de la politique de colonisation française en Algérie que l'on puisse faire, que la France n'a pas commis de génocide du peuple algérien.
La France, qui fut 132 années durant la puissance coloniale de l'Algérie, s'efforce de consolider son influence diplomatique et économique dans le deuxième pays le plus vaste d'Afrique dont les richesses en hydrocarbures et les projets de développement des infrastructures attisent l'intérêt des Etats-Unis et d'autres puissances de la planète comme la Chine.
La nouvelle charge de Bouteflika a été lue en son nom dimanche soir par le ministre des Anciens combattants, Mohamed Chérif Abbas, à la veille de la commémoration des massacres de Sétif et Guelma, entre autres, où plusieurs milliers de nationalistes algériens furent tués le 8 mai 1945.
"Il est évident que depuis le 5 juillet 1962 (date de l'indépendance algérienne), chacun est maître chez soi et qu'il n'est aucunement question de notre part d'exercer quelque pression que ce soit pour obtenir ce qui semble être le droit élémentaire de l'Etat-nation algérien: à savoir des excuses publiques et solennelles pour le crime de colonialisme commis contre notre peuple", y souligne notamment Bouteflika.
Il ajoute que les relations entre les deux pays ne sont pas en crise, mais qu'une amitié véritable ne peut se construire qu'à deux.
"Nos concitoyens et nos concitoyennes doivent savoir que si notre peuple a triomphé au prix de souffrances indicibles du colonialisme paré des oripeaux de la civilisation, ce n'est pas pour succomber aux sirènes d'une amitié cannibale", ajoute t'il.
Enfin, le président algérien conclue sur le fait que le peuple français devrait dire: "Oui, notre aventure coloniale a été génocidaire (...) Oui, notre Etat doit se purger de sa face obscure, de sa face colonialiste et, pour cela, comme l'ont fait d'autres Etats à travers le monde, présenter ses excuses aux peuples auxquels il a imposé son oppression colonialiste".
L'ambassadeur de France en Algérie avait pourtant déclaré que le massacre de Sétif était une "tragédie inexcusable".
La répression menée par l'armée française à Sétif a fait, selon les autorités algériennes, 45.000 morts. Des historiens européens avancent un bilan compris entre 6.000 et 20.000 morts.
Bouteflika avait réclamé pour la première fois en 2004 des excuses officielles de la France. Il avait renouvelé sa demande le 8 mai 2005.
Ces massacres sont considérés comme à l'origine du mouvement nationaliste et anticolonialiste algérien qui s'est achevé près de deux décennies plus tard au terme d'une guerre d'indépendance qui a fait 1,5 million de morts côté algérien, toujours selon Alger.
Dans son discours lu dimanche, Bouteflika souligne que "les problèmes qui existent aujourd'hui entre l'Algérie et la France sont devenus structurels". "Pour autant, ajoute-t-il, l'Algérie ne saurait continuer à les souffrir comme des rhumatismes chroniques ou même sclérosés."
Ses déclarations surviennent dans un contexte particulier en France, dont le passé colonial s'est retrouvé ces derniers mois au coeur de vives controverses qui se sont notamment cristallisées autour de l'article 4 de la loi du 23 février 2005 sur le "rôle positif" de la colonisation.
Sa précédente sortie sur le "génocide identitaire" puis son hospitalisation au Val-de-Grâce à Paris pour un bilan médical, fin avril, avait choqué une partie de la population française.
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