C'est la question que l'on se pose parfois en voulant appeler un ministre, un ecclésiastique ou un ambassadeur.
Comment doit-on les appeler. Monsieur ? Monsieur le Ministre ? Monsieur le Curé ? Monsieur le Rabbin ? Monsieur l'Imam ? Mon père ? Votre Excellence ? Monsieur X (par son nom) ? Cher Monsieur ? ....
Nous pouvons nous poser également cette question pour un Grand-Maître d'une obédience maçonnique.
Doit-on lui dire Monsieur, Madame, Monsieur le Président, Très cher Frère, Très Respectable, Sérénissime ...
Dans certaines obédiences les termes sont multiples : Alain Bauer par exemple était à la fois Président du Conseil de l'Ordre et Grand-Maître du Grand Orient de France. Cela date de la période après l'Empire où il n'y avait plus de Grand Maître mais juste un président du Conseil de l'Ordre. Mais quand le Grand Maître est revenu le président du Conseil de l'Ordre est resté. Il y a donc eu cumul de titres.
Autre sujet : doit-on féminiser les titres ? Dans certaines obédiences une présidente est "Grand-Maître", mais dans une autre elle est "Grande Maîtresse".
En ce qui concerne la Grande Loge de France j'ai regardé le sujet d'un peu plus près.
Le président de l'obédience s'appelle "Grand-Maître" depuis 1894. Auparavant, de 1821 à 1894, le Très Puissant Souverain Grand Commandeur du Suprême Conseil de France était en même temps Grand-Maître de la Grande Loge Centrale de France. Il cumulait les deux fonctions.
Alors comment appeler le Grand-Maître ?
J'ai regardé pour le savoir les divers Convents de la Grande Loge de France, au moins depuis les années 1920.
Au début c'était relativement simple :
- "Le frère Gustave Mesureur, Grand-Maître de la Grande Loge de France" en 1922.
- " Le frère Louis Doignon, Grand-Maître de la Grande Loge de France" en 1939.
Parfois voit-on apparaître deci dela un "Très cher frère".
Cela change après la Seconde Guerre Mondiale. Les appellations vont changer jusqu'à nos jours.
En 1945 et 1946 nous voyons apparaître pour la première fois " Le Très Illustre Frère Michel Dumesnil de Gramont, Grand-Maître de la Grande Loge de France". Peut-être pour souligner qu'il a le 33ème degré et plus haut degré du Rite Écossais Ancien et Accepté.
En 1948 changement : "Le frère Michel Dumesnil de Gramont, Très respectable Grand-Maître de la Grande Loge de France".
En 1949 : " Le frère Georges Chadirat, Grand-Maître de la Grande Loge de France"
De 1950 à 1964 et même avant, il semble que - ultra majoritairement - le "Très Respectable Frère X, Grand-Maître de la Grande Loge de France" l'emporte. Comme "Très Respectable Grand Maître".
En 1959 on voit apparaître un nouveau terme. Le Grand-Maître est toujours "Très Respectable Grand-Maître", mais l'on note - page 8 - "Allocution du Sérénissime Grand Maître Richard Dupuy".
En fait le terme est arrivé par petites touches en quelques années.
Un nom cela change. Et peut-être n'est-ce pas si innocent que cela. En effet le terme Sérénissime Grand-Maître est le terme employé au Grand Orient de France pour désigner le Grand Maître (Un Convent du GODF du début des années 2000, lui interdira de porter cette dénomination).
Certains pensaient à la GLDF qu'on ne pouvait pas faire moins qu'au GODF, les uns ayant un Très Respectable et les autres un Sérénissime.
L'idée aussi d'une fusion entre les deux obédiences (qui fera l'objet de plusieurs vœux) et le traité d'accord entre les deux obédiences (qui précipitera la crise de 1964) fait que beaucoup souhaitent appeler les deux principaux Grand Maîtres avec de la même façon.
Petit à petit cette terminologie va l'emporter à la GLDF aussi.
Exemple en 1963 les travaux du Convent sont ouverts par " Le Très Respectable Frère Louis Doignon, Grand-Maître de la Grande Loge de France " , qui préside.
En 1964 on élit toujours "un Très Respectable Grand Maître", même si le "Sérénissime Grand Maître" fait une allocution.
A partir de 1966 les choses sont parfaitement claires puisque le Convent élit "Le frère Roger Lemaire, Sérénissime Grand-Maître de la Grande Loge de France".
Peut-être (surement....) pour se rapprocher de la terminologie alors en vigueur au Grand Orient de France qui avait à cette période là aussi un "Sérénissime Grand-Maître", alors qu'à la Grande Loge de France, le terme le plus employé jusqu'alors était - comme nous l'avons vu "Très Respectable Grand-Maître"
Il en sera ainsi jusqu'en 1983. Lors de ce Convent, Henri Tort-Nouguès est élu "Sérénissime Grand Maître de la Grande Loge de France". ce sera la dernière fois.
L'année suivante, lors du Convent de la Grande Loge de France de 1984, il y a pour commencer l'allocution du "Très Respectable Grand Maître Henri Tort-Nougues" et avant sa réélection le Président du Convent remercie le "Très Respectable Frère Henri Tort-Nougues".
La volonté - implicite ... - était alors de se démarquer des usages en vigueur au GODF et de retrouver l'appellation antérieure de "Très Respectable Frère".
Exit donc le le Sérénissime. Il ne réapparaîtra plus !
Pour répondre à la question initiale de cet article , la meilleure façon de parler au Grand Maître de la GLDF est aujourd'hui de s'adresser au "Très Respectable Frère Pierre-Marie Adam, Grand Maître de la Grande Loge de France" ou au "Très Respectable Grand Maître de la Grande Loge de France".
Les 33 conseillers fédéraux de la Grande Loge de France sont également appelés "Très Respectables Frères".
D'autres obédiences pratiquant le Rite Écossais Ancien et Accepté, mais créées avant 1983 - à l'image de la Grande Loge Symbolique du Gabon (créée en 1975 à partir du Grand Rite Équatorial) - continuent jusqu'à aujourd'hui d'utiliser le terme de Sérénissime pour qualifier leur Grand Maître.
Eh bien figurez-vous que je suis très favorable au retour de la qualification de "Sérénissime" pour nos Grands Maîtres.
Pourquoi ? On pense à tort que c'est réservé aux nobles ("Altesse Sérénissime").
Or Sérénissime veut tout simplement dire "extrêmement serein" ou "le plus serein".
En ces temps particulièrement troublés que nous connaissons, que le Grand Maître ai comme objectif d'être le plus serein de tous... cette idée me plaît bien...
A réflechir....
Jean-Laurent Turbet
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Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.
La Constitution et les Lois de la République Française s'appliquent sur l'ensemble du territoire national et s'imposent à tout règlement associatif particulier qui restreindrait cette liberté fondamentale et Constitutionnelle de quelque façon que ce soit.
Jean-Laurent Turbet
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