Eh oui, une loge de la Grande Loge de France porte le titre distinctif de « Jean Jaurès ».
Même si cela peut paraître paradoxal voire étrange de nos jours, cela ne l’était pas au milieu des années 10 du 20ème siècle.
A cette époque, bon nombre de membres du Conseil Fédéral de la Grande Loge de France, à l’instar d’Elie May (de la loge "Les Trinitaires") étaient d’anciens Communards ou étaient très engagés politiquement comme Gustave Mesureur Loge "La Justice 133") où le Général Paul Peigné (Militaire dreyfusard, républicain et laïc) qui furent tous deux Grands Maîtres de la Grande Loge.
J’ai déjà évoqué plusieurs fois cette loge dans ce Bloc-Notes (vous trouverez plus bas deux articles), notamment à l’occasion du 150ème anniversaire de la naissance de Jean Jaurès.
Ce 8 décembre 2009, à 8h30, Alain-Noël Dubart, alors Grand Maître de la Grande Loge de France a – es qualité - évoqué la mémoire de Jean Jaurès au café « Le Croissant », 146 rue Montmartre à Paris, le lieu où il fut assassiné, et des frères de la loge « Jean Jaurès » ont remis d’importants documents le concernant au directeur du Musée Jean Jaurès de Castres, son lieu de naissance.
La Loge « Jean Jaurès » N° 469 de la Grande Loge de France a été créée le 25 juin 1917, en pleine Première Guerre Mondiale.
Elle fêtera ses 100 ans d’existence le samedi 18 novembre 2017 à 10 heures dans le Grand Temple de la Grande Loge de France en présence du Grand Maître Philippe Charuel.
La loge est créée par des frères qui étaient membres de la loge « L’Equité » du Grand Orient de France, elle-même créée en 1905 à Pantin.
Des frères de la loge l’Equité – dont Ezio Collaveri (qui sera maire socialiste de Pantin de 1953 à 1959) vont voir le Conseil de l’Ordre du GODF pour créer une loge pacifiste portant le nom de Jean Jaurès, le leader socialiste assassiné le 31 juillet 1914 à Paris au Café du Croissant.
Refus catégorique du Conseil de l’Ordre : Le GODF est pour l’Union Sacrée, donc une loge pacifiste c’est impossible. Et en plus, le nom d’un socialiste c’est encore plus impossible dans un GODF dominé par le Parti Radical (en décembre 1916 les socialistes quittent le gouvernement d’Union Sacrée de Briand ; soutien sans participation).
Les frères se rendent donc rue Puteaux à la Grande Loge de France. Le Conseil Fédéral dirigé par le Grand Maître qui est alors le Général Paul Peigné ( Grand Maître entre 1913-1918) leur donne le droit de créer leur loge avec le titre distinctif de « Jean Jaurès ».
La Loge est intégrée à la fédération de la Grande Loge de France le 25 février 1917.
La Loge Jean Jaurès existe toujours. Elle a 100 ans.
Elle a eu nombre de frères illustres sur ses colonnes dont Antonio Coen (Photo ci-contre, qui sera Grand Maître de la Grande Loge de France pendant quelques mois en 1955-1956), socialiste (SFIO), fondateur du Parti Communiste en 1920, et qui revint à la SFIO en 1922 après l’interdiction de Trotsky et du Komintern de 1922 de la double appartenance du Parti Communiste et la Franc-Maçonnerie. Grand connaisseur de Dante, Antonio Coen était avocat et il fut l’avocat de la CGT jusqu’à sa mort.
Antonio Coen a écrit avec Michel Dumesnil de Gramont (avec qui notamment il avait créé la loge « La Grande Triade » en 1947 en qui fut Grand Maître de la Grande Loge de France en 1935-1935, 1938-1948, 1950-1952)), un opuscule majeur, « Histoire de la Franc-Maçonnerie Écossaise », publié en 1934 et dont je vous recommande vivement la lecture. Vous trouverez ce texte en bas de cet article avec une préface de Claude Gagne.
La loge « Jean Jaurès » a été aussi celle du Préfet François Collaveri (Secrétaire de la GLDF, résistant il fut Secrétaire Général de la Préfecture des Bouches du Rhône à Marseille et avait été habilité à donner asile aux juifs qui étaient sur le bateau « Exodus », ce qu'ils refuseront, mais il les a traités avec dignité en leur offrant de l'eau et des vivres), 33ème degré du Rite Ecossais Ancien et Accepté et membre actif du Suprême Conseil de France (il « garda la vieille Maison » lors du conflit de 1964 et ne partit pas à la GLNF). François Collaveri fut un pionnier des études maçonniques concernant le 1er Empire et fut l’auteur des magistraux « La Franc-Maçonnerie des Bonaparte » (préfacé par Georges Dumézil) et « Napoléon Empereur Franc-Maçon » (préfacé par Jean Tulard).
Le premier Vénérable Maître de la loge « Jean Jaurès » est Laurent Rozières (initié à la loge « L’Equité » du GODF en 1911), maître d'école au Pré-Saint-Gervais, directeur de la publication de la revue maçonnique « L’étoile flamboyante »
Son très beau texte « Agir » sera lu le 18 novembre prochain par 10 frères de la loge « Jean Jaurès ».
Un film magnifique film de 38 minutes a été réalisé par l’excellent Daniel Le Bras et il sera projeté à cette occasion.
Comme vous l’avez compris ce sera une très belle journée !
Venez nombreuses et nombreux à l’anniversaire de la loge « Jean Jaurès ».
Pour y participer c’est simple il suffit de s’inscrire : http://centenaire.jeanjaures.net/. Ouvert à toutes et à tous. Gratuit.
Alors à samedi 18 novembre 10 heures à la Grande Loge de France (8, rue Puteaux 75017 Paris – métro Rome) pour fêter ensemble les 100 ans de la Loge Jean Jaurès !
Jean-Laurent Turbet
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Jean Jaurès et la Grande Loge de France. - Bloc notes de Jean-Laurent sur les Spiritualités
En ce mois de novembre 2013, nous entrons dans une dans une période qui va nous mener jusqu'au mois d'août 2014 et à la célébration du centenaire du début de la 1ère Guerre Mondiale. Le Pré...
http://www.jlturbet.net/article-jean-jaures-et-la-grande-loge-de-france-121087374.html
La Franc-Maçonnerie Écossaise, livre d'Antonio Coen et Michel Dumesnil de Gramont (1934). A lire absolument !
Attention ! Cet article, comme tous les articles du "Bloc-Notes de Jean-Laurent sur les Spiritualités", (http://www.jlturbet.net/) est écrit en mon nom personnel.
Je ne parle ni au nom d'une association, ni d'un parti, ni d'une loge, ni d'une obédience maçonnique.
Mes propos n'engagent que moi et non pas
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Je ne suis en aucune façon habilité à écrire au nom d'une association, d'un parti, d'une loge, d'une obédience maçonnique. Tout ceci pour que cela soit bien clair, qu'il n'y ait aucune ambiguïté de quelque nature que ce soit.
Quelles que soient mes responsabilités - ou non - présentes ou futures dans une organisation, les propos tenus dans cet article comme dans tous les articles de ce Bloc-Notes, sont exclusivement des opinions personnelles qui n'engagent que moi.
Je rappelle simplement que la liberté d’expression est en France un droit Constitutionnel, quelle que soit notre appartenance à une association de quelque nature que ce soit.
Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen pose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »
Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen pose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »
Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.
La Constitution et les Lois de la République Française s'appliquent sur l'ensemble du territoire national et s'imposent à tout règlement associatif particulier qui restreindrait cette liberté fondamentale et Constitutionnelle de quelque façon que ce soit.
Jean-Laurent Turbet
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