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Le Blog des Spiritualités

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L'apologie du Tablier, par Albert Lantoine. Texte de 1934.

Publié par Jean-Laurent Turbet sur 31 Mars 2016, 06:30am

Catégories : #Franc-Maçonnerie, #Histoire, #REAA, #GLDF, #Lantoine, #Tablier

L'apologie du Tablier, par Albert Lantoine. Texte de 1934.

Je poursuis, avec le texte ci-dessous, les recherches commencées il y a quelques articles déjà sur le port - ou plutôt l'absence de port - du tablier en loge.

 

L'apologie du Tablier, par Albert Lantoine. Texte de 1934.Le texte ci-dessous intitulé "apologie du tablier" est d'Albert Lantoine, historien de la maçonnerie, membre de la Grande Loge et du Suprême Conseil de France, auteur maintenant bien connu des lecteurs et des lectrices de ce bloc-notes.

 

Il a été publié en 1934 dans la revue "Le Symbolisme", dirigée par un autre grand maçon de la Grande Loge de France, Oswald Wirth.

 

Ce texte m'a été fort opportunément envoyé par l'ami Philippe Langlet qui est lui-même l'un des tous meilleurs historiens français de la maçonnerie, auteur d'une oeuvre majeure qui mériterait d'être bien mieux connue.

 

Les lecteurs et lectrices de ce bloc-notes connaissent bien maintenant mon admiration l'homme qu'était Albert Lantoine et pour son oeuvre essentielle. Qu'ils sachent que je travaille à un article plus long qui lui sera consacré.

 

Mais voici le texte de Lantoine : 

 

Apologie du Tablier, par Albert Lantoine, 1934

 

Extrait de la revue « Le Symbolisme », créée par Oswald Wirth en 1911.

 

Lorsque de longues années (que je ne veux pas, par coquetterie, évaluer), j’étais vénérable de la R :. Loge La Jérusalem Ecossaise, un maçon anglais qui se trouvait sur nos colonnes fit, au cours de la discussion, une « sortie » contre ses frères français. Il leur refusait la qualité maçonnique parce qu’ils ne portaient pas le tablier. Bien que cette « sortie » fut énoncée en termes courtois, je l’estimais non seulement déplacée mais injuste.

 

La Jérusalem Ecossaise était alors un de ces ateliers dits révolutionnaires où on ne se préoccupait que fort peu – trop peu – de ritualisme de l’Institution, et les rires des assistants firent tout de suite justice de cette ridicule observation.

 

Ridicule ? Je la jugeais telle à l’époque. Depuis, mon sentiment sur  ce point a nettement changé. Certes, je pense toujours que le véritable maçon ne se reconnaît pas à la particularité de son insigne, mais il sied de constater cependant que, si le respect des traditions est une de ses vertus, il ne doit pas mépriser celle-là plus que tout autre.

 

Ce n’est pas seulement la réflexion et l’expérience qui ont contribué à modifier mon avis, sur le sujet, mais la fréquentation de nombreux orients étrangers.

 

Partout, que ce soit dans les pays anglo-saxons et balkaniques, en Belgique et en Suisse, j’ai pu me convaincre que le tablier était d’un usage obligatoire. Et j’avoue que, me trouvant dans leurs assemblées maçonniques avec un simple cordon, j’avais l’impression de jeter dans l’ensemble une note discordante. C’était une originalité dont je ne m’enorgueillissais pas parce que je prenais conscience que la raison n’était pas de mon côté.

 

Nos ancêtres du XVIIIe siècle portaient le tablier. Comment cette coutume s’est elle perdue ? Il y aurait là une recherche à faire qui ne manquerait pas d’intérêt, et du point de vue historique et au point de vue moral. Car, enfin, à quel mobile a-t-on obéi en faisant du cordon le seul insigne de notre grade ?

 

Si vraiment nous demeurons démocratiquement glorieux de notre ancestralité opérative, pourquoi a-t-on dédaigné cet « emblème du travail », aussi nécessaire, aussi symbolique pour le maître que pour l’apprenti ?

 

D’ailleurs quelques Loges de la Grande Loge de France – dont Le Portique – ont décidé de revenir à cette ancienne tradition. Il serait à désirer que cet exemple fût suivi – dans notre obédience surtout.

 

L’Ecossisme y trouvait une occasion nouvelle d’affirmer – et de justifier une fois de plus – son caractère international.

 

Albert Lantoine.

 

Ce texte de Lantoine est intéressant à plus d'un titre.

 

L'apologie du Tablier, par Albert Lantoine. Texte de 1934.Rappelons d'abord qu'Albert Lantoine a été reçu à la Grande Loge de France (N° 38759 à la matricule du rite) au sein de La Jérusalem Ecossaise le 24 mai 1901. Il deviendra Compagnon et Maître quelques mois plus tard - le même jour le 12 juillet 1901.

 

Il devint Vénérable Maître de cette loge quelques années plus tard.

 

Albert Lantoine sera reçu 33ème degré du Rite Ecossais Ancien et Accepté le 28 mai 1926 et sera coopté au Suprême Conseil de France l'année suivante.

 

En 1910 il a créé la loge Le Portique. Il en est le premier membre fondateur (voir tableau ci-contre) et le premier Vénérable Maître.

 

Placée sous les augures des penseurs et philosophes de la Grèce Antique cette loge sera attachée à pratiquer la Franc-Maçonnerie de Tradition qui - il faut bien le dire - s'était perdue dans la Franc-Maçonnerie à caractère politique malheureusement pratiquée à ce moment là par nombre de loges de la Grande Loge de France.

 

La loge Le Portique fut - comme de nombreuses loges - victime de la Première Guerre Mondiale. Les frères furent décimés. Il fallut attendre le 20 janvier 1922 pour que la loge - aidée par de nouveaux frères comme Michel Dumesnil de Gramont - puisse de nouveau rallumé ses feux.

 

Le Portique avait par exemple rétabli la Bible sur l'Autel des Serments.

 

Les frères avaient également repris la pratique du port du tablier - emblème du travail - en loge. C'est ce que Lantoine indique dans cet article. 

 

L'exemple du Portique va faire tache d'huile.

 

D'autres loges vont demander à leurs frères de porter le tablier.

 

Dans un article précédent nous avons vu que Lantoine se posait la question de savoir quand les frères avaient abandonné la pratique du port du tablier ?

 

Il n'en reste pas moins que la pratique du port du tablier avait repris suffisamment force et vigueur pour que - comme nous l'avons vu également dans un article précédent, un voeu soit déposé lors du Convent de 1936 de la Grande Loge de France, pour que les frères maîtres portent de nouveau un tablier.

 

Ce fut un labeur de plusieurs dizaines d'années pour que les pratiques traditionnelles et maçonniques reprennent force et vigueur à la Grande Loge de France.

 

Avec, entre autres mesures :

 

- Voeu 1936 sur le port du Tablier.

- 1937 : Les Constitutions d'Anderson de 1723 sont mises sur l'autel des loges (pour se rapprocher de la maçonnerie internationale).

- Port du tablier généralisé après Guerre.

- Fin des loges d'adoption au sein de la Grande Loge de France et indépendance des loges féminines au sein de la Grande Loge Féminine de France (1945 pour l'UFF puis 1952 pour la GLFF). Réaffirmation de la non mixité des travaux rituels.

- 1954 : La Bible, Volume de la Loi Sacrée sur l'Autel des Serments.

Adoption de rituels de plus en plus conformes à l'esprit de nos rituels princeps qui sont le socle de la pratique régulière du Rite Ecossais Ancien et Accepté.

 

Il est à noté qu'avant 1910, il n'était pas étonnant qu'un maçon anglais soit présent sur les colonnes d'une loge de la Grande Loge de France et même de loge comme La Jérusalem Ecossaise (que Lanoine lui-même qualifie de révolutionnaire).

 

Lantoine lui-même visite nombre de loges "régulières" à l'étranger. C'est de là d'ailleurs qu'il va changer d'avis sur le port du tablier "symbole du travail opératif" et qu'il va en faire l'apologie une fois revenu en France.

 

L'Ecossisme a en effet vocation à l'Universalisme.

 

Albert LANTOINEAlbert Lantoine l'écrivain, le poète, l'Historien dont la probité et l'honnêteté intellectuelle sont reconnus même par les adversaires de l'Ordre devrait reprendre toute la place qui est la sienne dans l'Histoire de la Grande Loge de France.


Il devrait être un phare, un exemple incontournable et exceptionnel pour les frères d'aujourd'hui. Celui d'un cherchant libre qui a toute sa vie chercher à appronfondir sa connaissance du Rite et à faire rayonner les valeurs tradtionnelles et intemporelles de l'Ordre Ecossais.

 

J'évoquerai bientôt sa mémoire plus en détail (notamment avec l'aide de notre ami et très cher frère érudit Claude Gagne qui a tous ses écrits).

 

Avec "l'apologie du tablier", Albert Lantoine souhaite en fait faire l'apologie de notre Ordre, de notre Rite, de notre Tradition vivante, surtout si elle est toujours conforme aux valeurs initiatiques intemporelles de l'Ordre.

 

Albert Lantoine concluait ainsi son discours lors du réveil de la Loge Le Portique le 20 janvier 1922 :

 

Que ceux qu’enchanta jadis la saveur des lettres grecques se rappellent les philosophes tenant les propos ingénieux devant de jeunes hommes attentifs. Qu’ils évoquent l’Athènes aux matins clairs et aux soirs dorés alors que ces philosophes distribuaient des préceptes de sagesse. Là-bas les bruits de guerre retentissaient le long du Port. Là-bas l’agora soufflait toutes les passions des foules. Des orateurs injuriaient des ennemis ou acclamaient des généraux, mais le vent favorable n’apportait pas leurs cris sous le portique sacré.

 

Nous aussi nous devons fermer notre porte aux bruits de l’agora. Nous entrons dans ce temple, selon le mot de Kratès, avec des « âmes neuves ». Nous devons laisser dehors nos chagrins et nos joies aussi et les rancunes que déposent en nous quotidiennement le labeur nécessaire, les coudoiements de la rue et la lecture des feuilles publiques. Ici les mots de haine ne doivent pas être prononcés. Ici nous ne devons jamais condamner les hommes, même ceux qui commirent les forfaits les plus grands, mais les comprendre, car le mobile de tous les actes, s’il n’apparaît pas au juge qui frappe, ne saurait échapper au penseur qui pardonne.

 

Nous voulons nous pencher vers les perversités morales comme un médecin examine les maladies corporelles, en songeant que pour les unes comme pour les autres, l’homme porte le poids d’un aveugle destin.

 

 

En ce moment où la vie politique prend une place trop grande dans les préoccupations journalières, nous voulons considérer les choses au seul point de vue philosophique et critique – avec calme, avec douceur - et disons le mot : avec sérénité. Car, serviteurs très humbles de l’Idée et de notre titre, nous savons que c’est la sérénité de la pensée hellène, inscrite aux frises du Parthénon comme dans les Dialogues de Socrate qui, plus que l’héroïsme des guerriers, a fait les âmes nobles et l’Hellade immortelle."

L'apologie du Tablier, par Albert Lantoine. Texte de 1934.
L'apologie du Tablier, par Albert Lantoine. Texte de 1934.

 

 

 

 

Attention ! Cet article, comme tous les articles du "Bloc-Notes de Jean-Laurent sur les Spiritualités", (http://www.jlturbet.net/) est écrit en mon nom personnel.

Je ne parle ni au nom d'une association, ni d'un parti, ni d'une loge, ni d'une obédience maçonnique.

Mes propos n'engagent que moi et non pas l'une ou l'autre de ces associations.

Je ne suis en aucune façon habilité à écrire au nom d'une association, d'un parti, d'une loge, d'une obédience maçonniqueTout ceci pour que cela soit bien clair, qu'il n'y ait aucune ambiguïté de quelque nature que ce soit.

Quelles que soient mes responsabilités - ou non -  présentes ou futures dans une organisation, les propos tenus dans cet article comme dans tous les articles de ce Bloc-Notes, sont exclusivement des opinions personnelles qui n'engagent que moi.

Je rappelle simplement que la liberté d’expression est en France un droit Constitutionnel, quelle que soit notre appartenance à une association de quelque nature que ce soit.

Dans son article 10, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose que : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi. »

Dans l'article 11, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen dispose aussi que : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. »

Ces deux articles ont valeur constitutionnelle car le préambule de la Constitution de la Ve République renvoie à la Déclaration de 1789.

La Constitution et les Lois de la République Française s'appliquent sur l'ensemble du territoire national et s'imposent à tout règlement associatif particulier qui restreindrait cette liberté fondamentale et Constitutionnelle de quelque façon que ce soit.

Jean-Laurent Turbet

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H
Le moins que l'on puisse dire est que les passages de Grades etaient extremement rapides a la GLDF de l'epoque... pas tres serieux. Heureusement ce n'est plus une pratique
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